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Le Prof. Didier Raoult (IHU de Marseille) rappelle la liberté constitutionnelle des professeurs d'Université sur BFMTV.



Le Prof. Didier Raoult (IHU de Marseille) rappelle la liberté constitutionnelle des professeurs d'Université sur BFMTV.
Avec les chercheurs qui ont leurs convictions, acquises après 40 ans de travaux, pratiques et théoriques, avec parfois une équipe de recherche, on voit bien le statut de l'enseignant-chercheur, dont celui de professeur d'université. Hier au soir, interrogé sur BFM TV, le fameux professeur Didier Raoult a rappelé à un moment son statut.

Parmi les règles du statut d'universitaire figure le principe constitutionnel de libre et totale expression.

Il l'a fait car il se considère libre de dire, par exemple, c'est moi qui m'exprime pour mettre en valeur le principe juridique, que...
la saisonnalité fera qu'il n'y aura probablement pas de 2e vague, que la contagiosité n'est pas aussi élevée que ce que l'on comprend, que son traitement est efficace, que l'HDC n'est pas dangereuse car elle a été administrée à des millions de personnes depuis des décennies, que l'ANSM émet une alerte qui est inexplicable pour le médicament le plus prescrit au monde après l'aspirine, qu'une infection virale ça se traite, qu'une telle infection ça se dépiste massivement, que les séquelles peuvent inquiéter... j'ajoute que la crise est à ce point grave que cette liberté couvre à mon sens tout sujet, jusqu'à la forme des masques... j'ajoute que la crise est tellement multi-forme que finalement toute position est couverte par cette liberté, par exemple la forme des masques ! Et pas seulement les chiffres des pre-prints de l'IHU !

Il a ainsi indiqué qu'il était totalement libre de ses opinions et qu'il avait le droit de les exprimer et, précisément : que cette liberté d'expression était "gravée dans la Constitution" : l'idée est la bonne, l'expression non.

Cette liberté résulte d'un décision du Conseil constitutionnel (Décision n° 83-165 du 20 janvier 1984, « libertés universitaires » ; voyez le document ci-dessous et le lien internet : j'en ai parlé, il y a 10 ans, ici même).

Les professeurs d'université mènent librement leurs recherches et expriment librement leurs résultats et leurs opinions. Les juristes peuvent ainsi démontrer le caractère stupide des lois ou décrets sans être révoqués par les organes d'Etat qui les adoptent. Les médecins peuvent exprimer leurs doutes ou vivement critiquer tel médicament (pensez : Mediator 150 mg : combien de morts ? , éd. Dialogues, 2010, par la professeure Irène Frachon, CHU de Brest).

Le monde des réseaux sociaux sera déçu car certains pensent et écrivent que "Raoult va prendre cher". Or, aucun ministre, aucune autorité quelconque, universitaire, administrative ou scientifique, pas même le juge, ne peut sanctionner un universitaire pour sa recherche et son expression. Comprenez au plan pratique : professeur il est, et professeur il restera ! Sauf la retraite...

C'est un principe majeur pour empêcher l'avènement d'un quelconque totalitarisme, ceux qui attaquent les universitaires sans trop savoir ce qu'ils disent devraient y réfléchir. Un régime totalitaire commence par révoquer les professeurs d'université. Ou les expédier au poteau d'exécution...

En revanche, les médecins qui ne sont pas libéraux (les médecin libéral est assez libre) et qui ne sont pas universitaires (professeurs d'université ou maîtres de conférences), ne disposent pas de cette liberté constitutionnelle de parole. La plupart, du reste, n'ont jamais fait de recherche ni publié, or ce principe constitutionnel protège seulement ceux qui ont à l'être pour leurs recherches et enseignements et directions de recherche (dont les thèses).

Les recherches médicales sont néanmoins réglementées, comme l'exercice de la médecine. On a été étonné de constater qu'il y avait autant de spécialistes du (haut) droit de la santé, sachant manier les nuances de ce droit de la recherche. Pourtant, aucun ne connaissait le statut constitutionnel de professeur d'université.

Il faudrait veiller à le conforter, pour le salut public : contre la langue de bois univoque de l'Etat notamment - mais pas seulement.

La plupart des gens qui s'expriment, parfois des médecins, parfois des candidats au doctorat (notamment de médecine ou de biologie), sont ainsi parfois loin des réalités juridiques et opérationnelles. Et avec eux certains chercheurs qui sont soumis à la hiérarchie d'un organisme de recherche et qui, en réalité, n'ont que peu de latitude de recherche et d'expression.

Tout le monde peut s'engager dans la recherche qui conduit au statut de professeur d'université qui requiert : un doctorat de très haut niveau est nécessaire, puis le diplôme d'habilitation à diriger les recherches, puis le concours des professeurs d'université. La liberté totale d'expression se gagne à ce prix.

Plus haut, si vous réussissez, vous pourrez, si vous continuez à publier et à diriger des thèses, par exemple, diriger une équipe de recherche ou une unité opérationnelle (comme un IHU ou une autre entité administrative).

Cette liberté constitutionnelle est consacrée pour que la recherche et que l'enseignement du supérieur soit libres.

Illustration sur l'enseignement. Dans cet entretien, il a été précieux d'entendre que le démoniaque professeur Raoult commence certains de ses cours en disant :
"ce que je vais vous enseigner est faux, mais il faut bien commencer par des choses simples". Il a ainsi rappelé que les progrès de la science conduisent à enseigner des choses fausses que, d'années en années, on corrige...

Je suis désolé de déstabiliser quelques lecteurs... L'intéressant pour nous aura donc été les considérations épistémologiques évoquées, qui déterminent recherches et enseignements. Dans toutes les sciences et disciplines c'est trop peu dit.





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Quand un futur membre du Conseil constitutionnel, en 2010, attaquait les universitaires



Document

Réponse du Ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

publiée dans le JO Sénat du 22/08/2019 - page 4317

Le principe d'indépendance des enseignants-chercheurs dans l'exercice de leurs fonctions d'enseignement et de leurs activités de recherche a été consacré comme principe fondamental reconnu par les lois de la République. Dans sa décision n° 83-165 DC du 20 janvier 1984, le Conseil constitutionnel a ainsi déclaré que « les fonctions d'enseignement et de recherche non seulement permettent mais demandent, dans l'intérêt même du service, que la libre expression et l'indépendance des personnels soient garanties par les dispositions qui leur sont applicables » (cons. 19) et « qu'en ce qui concerne les professeurs, (…) la garantie de l'indépendance résulte en outre d'un principe fondamental reconnu par les lois de la République » (cons. 20). Ces principes ont été rappelés dans la décision 93-3225 DC du 28 juillet 1993 (cons. 7). L'indépendance et la liberté d'expression des enseignants-chercheurs sont reconnues au niveau législatif dans l'art. 58 de la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984...

Ici la suite de cette question / réponse sur un thème précis





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En illustration, le beau Code de la recherche dirigé par le prof. E. Vergès.

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