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L'effondrement politique et social, l'effondrement juridique. Quel droit, pour quelle société ? Lettre à Nicolas HULOT.



Résumé. Cette analyse pessimiste décrit la société très très décevante dans laquelle nous vivons ; elle s'appuie sur le discret effondrement du droit pour confirmer l'effondrement général ; il nous reste à faire notre testament ; mais tout pourrait changer si - à l'aide de ce violent criticisme ? - la société trouve un tueur dont la pensée nouvelle fonderait une révolution.

L'effondrement politique et social, il est des semaines ou mois où il n'est pas besoin d'introduire le sujet tant les événements de politique quotidienne, qui s'accumulent, désarticulent notre pensée et désemparent notre conscience. Le président de la République semble avoir cassé tous ses jouets constitutionnels en quelques semaines. En vérité, comme les autres, il est à la tête d'un système qui sombre lentement.

Tout y passe, l'administration des finances (Déesse de son Etat !), discréditée, le cabinet du président lui-même depuis sa tête jusqu'à une quasi-barbouze, le ministre star, d'Etat, on est en plein sujet (l'Etat), à la désertion solennelle, les étudiants parqués dans des ordinateurs en attendant une place en amphi, un déraillement ridicule en pleine gare même...

Le jugement public amortit peut-être le néant dans lequel on est propulsé : on reste de gauche ou de droite, ou du en même temps, sans poser les problèmes. De pauvres diables brandissent encore telle ou telle religion.

Seul le sport professionnel trompe parfaitement le citoyen : il y aura bien un résultat au match de son équipe préférée, YOUPI ! Les journalistes en parleront des heures pour ne rien dire, les contrats (un transfert de 100 millions sinon rien...) seront de plus en plus mirobolants qui font croire que la société marche... Voilà seulement une mauvaise herbe dans la magnifique société jardin dont nous rêvons.

L'effondrement politique et social comporte l'effondrement juridique. Le système juridique, symbole de l'ordre de la société construite et en marche, aura peut-être été le premier à vaciller. C'est la société construite à la fin du XIXe siècle avec les principes de son début qui s'effondre. A voir ce qu'en disent les auteurs, la doctrine juridique.

Le positivisme juridique a duré et brillé. Il dure et brille encore, mais son éclat vient de la forme. Il occupe les esprits, mais il en a peu, et il en donne peu. Il donne de la technique. Il occupe les agendas et les forces, pour l'entretenir : le tenir à jour. On récite et on récite. On met en ordre. En chapitres et en sections.

C'est beau, c'est intelligent, c'est même parfois courageux. Mais que met-on en ordre quoi et pourquoi ? On ne saurait réduire la pensée juridique à quelques opinions sur ceci ou sur cela à partir de trois réalités abstraites et techniques tirées de la loi... La planète prend feu et l'on raisonnerait avec 3 articles de chacun 3 lignes...?

Juste à côté c'est pareil. On fait pareil, on met en ordre. Dans la loi, au moyens de codes. Les administrations et le législateur sont occupés. Le juge aussi. En attendus qui présentent, en attendus qui exposent et en "attendus" (de décisions de justice) qui tranchent mais rarement au moyen d'un principe puisque toute matière juridique est propre à noyer le juriste. Un juge peut ainsi vous raconter que la pire des banques a été bien sous tout rapport ; passe un reportage sur ARTE et c'est sans proportionnalité aucune que le juge est discrédité...

Le droit positif (les textes applicables actuellement), soit le droit actuel, appelle tellement d'ordre, que le poids des ordres mis étouffe les principes et la raison d'être des choses. Ainsi, le droit positif est aujourd'hui un poids, de plus en plus lourd, pour une efficacité de plus en plus réduite.

L'inefficacité du Droit est à la hauteur de l'effondrement démocratique, lourd et presque silencieux.

La loi recule de trop avancer, d'avoir trop avancé sur des terres vaines. Le Code de la route est une illusion ; on peut baisser les vitesses, si elles restent en pratique hautes, et aux mauvais endroits, les dégâts sont grands ; la mentalité de brûler une bande blanche se fait en toute confiance - et sans clignotant, bien sûr. Il faut autre chose que des règles de plus en plus contraignantes car elles sont de plus en plus violées.

Il faut un discours. Il faut aussi une politique.

Cela s'appelle une politique législative. Improviser des nominations de garde des Sceaux interdit de donner au citoyen d'entendre ces mots : "politique législative". Si tout ministre de la Justice ignore le concept, c'est que tous les membres du gouvernement l'ignorent...

Le Droit meurt également par diverses boursouflures qui sont des maux aussi variés que, pour chaque cas, spécialement néfastes (accès au droit, simplification, clarté). On manie des mots un peu tombés du ciel mais qui évoquent trop - ou seulement - le "modernise" américain, ou l'Antiquité, ou parfois la Renaissance...

Si ça vient d'ailleurs ou que c'est vieux, ce doit être bien !

Tentatives désespérées, ni amenées, ni puisées au fond du fond, ni construites aux subtilités agiles de la physique quantique qui s'empare du monde, non sans rappeler la poétique...

En droit, la terre est encore plate et on en est propriétaire jusqu'au noyau terrestre.

Bon, pour un colloque, ça ira bien. Faire illusion, manier l'hypocrisie, c'est montrer de bonnes manières de l'ancienne société. Cette société qui pourtant a mondialisé la drogue, affamé des peuples entiers, mis en tutelle des continents, inventé le sport pro destructeur de la santé, dévoyé la subtile monnaie, vanté les princes inutiles, creux et bêtes, déployé des guerres sur tous les sols avec des "héros"... et dévasté la planète en tout point constituant un élément naturel.

Allez, après cela, vous remonter le col de déontologie, d'éthique. de morale... ou de régulation, de compliance, de règles de conduite... tout cela pour encore masquer les désastres, les efforts à faire, les révolutions à opérer. Le juriste peut vouloir percer des mystères nichés en des mots, certes, mais encore faut-il le faire avec des résultats qui tiennent en une ligne applicable et, claire : compréhensibles par la société. Or le juriste se perd dans les thèmes à la mode de cette société, en apparence assez solide, mais faites de planches pourries.

Nous sommes à la fois une société en marche et à l'arrêt - feu vert et feu rouge allumés simultanément. A l'arrêt pour construire une société durable. En marche vers notre perdition, enfermée dans le béton qui est le signe de ce temps. Il ne nous reste probablement plus qu'à dresser notre testament.

On ne s'imagine mal les efforts à faire pour sinon en sortir, avec à la clé une belle réforme des banques centrales pour financer la réforme de la planète (Nicolas, note cette idée ton amie du gouvernement ne l'a pas notée). Et déjà, il faut aller dire à ce champion du monde, charmant, millionnaire, qui a fait 20 heures d'avion pour faire du bateau écolo (il le poste sur Facebook...) qu'il est un pitre tuant la planète et ses civilisations. Pas facile.

A moins que par le Droit, on puisse réaliser une révolution totale, radicale et brutale (sinon la planète sera a priori perdue, ou 80 % de sa population...). Imposer le business vert et la croissance plate. Un nouvel idéal. Pour que tous les feux soient au vert.

Mais quelle philosophie pourra éradiquer d'un Essai un seul l'ancienne société ?

Quel essai ?

Faut-il un tueur comme Emmanuel KANT ?



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