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L'introduction. Remarques pour quelques écrits...



L'introduction. Remarques pour quelques écrits...
L'introduction est un exercice délicat qui, davantage que les lignes constituant un développement, exige équilibre et fermeté. L'introduction permet de captiver le lecteur ou au contraire de le décevoir, souvent elle le fait patienter inutilement : perdre son temps. Rares sont les introductions trop longues. Nombreuses sont celles trop courtes. Nombreuses sont les introductions creuses. Rares sont les introductions substantielles. En général, une introduction mérite un peu de longueur pour toucher à la substance du sujet. Chassez l'idée que l'introduction est le fait d'occuper quelques pages (1 ou 2 pour une copie double, 3 pour un mémoire). L'introduction n'a pas de taille idéale, laquelle se détermine par... ce qu'il y a à dire ! Sur ce point comme d'autres, la méthodologie donne une ou deux méthodes qui ne sont que "bon sens" et "simplicité".

Ce qu'il y a à dire : ce qu'il y a dire pour déterminer les points intéressants du sujet, et ce qu'il y a à dire pour cerner les points à ne pas traiter et qui semblent dans le sujet. C'est aussi l'occasion de souligner l'intérêt du sujet : d'actualité ? Intéressant pour tous ? Pour certains ? Pour une matière précise ? Pour une opération particulière ? Est-ce une opération contentieuse ? Ou au contraire une institution habituellement sans contentieux. Et puis il faut cerner les deux ou trois points névralgiques et dire clairement de quoi il ressort. Cela signifie que l'on peut, pour les exercices et écrits juridiques, formuler des questions de droit (une question s'il s'agit d'un arrêt à commenter) : le juriste pose des questions claires et y répond clairement, contrairement à ce que croient trop de personnes. La vocation du juriste est de dire si dans telle situation une personne a ou pas le droit ! Les débats infinis qui ne débouchent que sur des impressions ne sont pas de pures analyses juridiques, quelles que soient par ailleurs leur intérêt.

Ces diverses choses à dire exige de structurer l'introduction en paragraphes (lequel s'identifie par un saut de ligne et un retrait de marge !). Le paragraphe est un temps dans la réflexion, dans la démonstration, il isole un point, une question. Un paragraphe peut souligner les intérêts du sujets. Un peut écarter les points proches mais qui ne sont pas dans le sujet, ce qui exige une motivation brève mais ferme. Un paragraphe soulignera les deux ou trois points névralgiques du sujet, le coeur du sujet et, en les classant, il s'en déduira le plan d'écriture, soit l'ordre dans lequel on entend traiter des questions qui se posent en motivant ce choix par des arguments logiques. Une introduction claire et structurée simplifie au lecteur sa tâche : il sait s'il doit vous lire ou si le sujet est traité sous un angle qui, en définitive, ne l'intéressera pas (on ne parle donc pas ici de copies d'examens mais d'autres écrits). Dans les oeuvres importantes, l'introduction peut appeler une structuration qui prend la forme d'un plan (I - II / I - II - III) qui organise les plus de dix pages utiles qui, toutes, coulent vers un même point.

L'annonce du plan doit se déduire simplement - mais sûrement - de ces considérations sur le coeur du sujet. Il faut s'assurer des liens logiques entre ces propos et l'annonce du plan. Parfois, les mots qui cernent le sujet en trois paragraphes doivent être repris dans les intitulés du plan : on est alors sûr de ne pas "mettre à coté de la plaque". Croyez-vous qu'il soit rare de voir un étudiant vous dire que le sujet porte sur l'obligation de moyens en vous proposant une partie sans cet intitulé mais avec les termes ("inverses") "obligations de résultat" ? L'introduction doit démontrer la cohérence de l'auteur : rejeter les faux thèmes, préciser les thèmes pertinents et annoncer une organisation (un plan) qui permettent de les traiter. L'esthétique de l'introduction emprunte aux lignes simples et claires de la plupart des oeuvres classiques... et ce afin de parler du sujet et non d'autre chose. L'introduction est donc à ce point déterminante qu'on pourrait imaginer la rédiger après le corps du devoir (pour les exercices donnant lieu à la remise d'une copie) mais après avoir inventorier avec rigueur ses divers points et leur ordre. On peut imaginer garder sa copie double pour l'introduction et commencer la partie I sur un intercalaire, donc page 5, ou page 4 soit la dernière de la copie double (ce qui évitera de placer des intitulés de parties ou de sous-parties à la dernière ligne d'une page ! N'y a-t-il rien de plus inopportun ?). Inutile de dire que cela suppose maîtrise et sang-froid, mais cette inversion de la pratique n'est peut-être pas un inversion de la logique : comment introduire ce qui n'est pas encore écrit ?

La richesse de l'introduction préfigure généralement un travail riche. L'auteur s'est débarrassé des fausses pistes. Il a souligné les points à creuser. Le cas échéant il ne sait pas "tout" ce qu'il va écrire : voilà une occasion de faire un travail original ! L'auteur s'interrogera sincèrement sur deux ou trois points dans le corps du devoir, comme il l'avait annoncé (pas d'annonces déceptives) dans l'introduction. Autant dire que l'introduction est une sorte d'acte de sincérité, préparation en vérité indispensable à un raisonnement dynamique, authentique et propre. Et ce sera déjà beaucoup de points positifs qui pousseront la note vers le haut. Plus subtilement, l'introduction permet sans doute de sonder la profondeur de pensée de l'auteur de la copie, du mémoire, de la publication, de la thèse... L'auteur qui est court en pensée aura tendance à garder la moindre idée ou remarque pour le corps du devoir : l'introduction se creusera. Celui qui est inspiré osera dire ce qui peut être dit en deux phrases, soit deux lignes, pour souligner l'intérêt du sujet ou un point qui, à l'inverse, paraît à tort le nourrir. L'introduction en dit long !

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