Droit des sûretés, LexisNexis, 2022, par Michel Cabrillac et alii.



Voilà le "Michel Cabrillac et Christian Mouly" bien campé dans le XXIe siècle. Le malheur semblait en avoir décidé autrement avec la disparition prématurée de Christian Mouly en 1996. Michel Cabrillac, disparu en 2014, avait décidé de conjurer le sort et Philippe Pétel l'a soutenu dans ce projet, immense, humain, personnel et intellectuel.

Cette dernière édition, de 2023, par Philippe Pétel et Séverine Cabrillac, place définitivement ce travail dans les belles œuvres du premier quart du XXIe siècle : ce n'est pas rien. Et l'on m'excusera de ne pas dire ce que c'est : cela me dépasse.

Ce livre est désormais une œuvre entre morts et vivants, entre collègues d'hier et d'aujourd'hui, entre — largo sensu — pères et enfants, entre des esprits qui subliment le cadre administratif auquel "on" (!) est astreint et qui, parfois, ne favorise pas les œuvres de longue durée. Or ces œuvres qui durent charrient, en guise de richesses, les contraintes du passé en sorte que la plume neuve sait mieux hésiter à tout refaire à l'encre fraîche. Dans ces ouvrages le passé vaut son pesant d'or. L'auteur seul ou celui qui succède à un autre, parfois un peu par hasard, n'a pas ce miroir et rappel solennel du passé écrit par des proches : ces phrases sculptées par les pères, par les maîtres, et que l'on ne peut modifier qu'après de mûres, sages et prudentes méditations.

Ces ouvrages de long terme voulus par un duo intellectuel qui ne se contente pas d'accoler des articles ou fascicules pour en faire un livre, mais qui le pensent en parfaite osmose, et dans sa moindre essence, ces livres-là portent, rapportent et reportent la valeur et la subtilité des mécanismes depuis longtemps consacrés. Il peu aussi s'agir d'expériences juridiques éphémères qui, parfois courtes, et souvent oubliées, en disent long ! Ceux qui succèdent à l'entreprise commune, à l’œuvre homogène, ne reprennent la plume que sous une délicate injonction les invitant à marier idéalement le droit d'hier à celui d'aujourd'hui qui, ici comme ailleurs, a tant changé.

Dans l'éboulement dantesque que constitue le droit positif, qui suggère encore le tsunami ou le cataclysme, bien plus que l'administration des humains ou des États, la difficulté est de garder le sens d'hier qui ne saurait totalement s'épuiser dans la nouveauté normative.

Ces lignes, pages et chapitres, précis et sages, font de Droit des sûretés une leçon qui, souvent, oblige à relire le propos pour le simple plaisir de l'eau qui court, coule et chante comme la vie. On est à la leçon. On est encore étudiant.

"Hervé, me disait un jour Michel Cabrillac en visant l'un de ses intenables collègues, et peut-être quelque autre, j'ai toujours eu un faible pour les tempéraments au sang chaud." Puissent ces lignes lui faire songer un instant non au sang, mais au cœur. Il me fait chaud au cœur de me transporter dans un "hier" qui occupe tant "aujourd'hui".

Bravo aux auteurs.


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