hervecausse

Les institutions de marché et les négociations dites boursières (quelques points sur un cours de Droit de l'investissement), et le marché...



Un tableau des acteurs de la place financière est indispensable. Il ravit les étudiants qui le prennent en photo ! Les flèches, les carrés et les cercles permettent de synthétiser ce qui se passe sur un "marché financier" (expression non-juridique qui manque de pertinence, ça, c'était le tout début de mon cours).

La suite disait ce qu'était un marché, avec le Code monétaire et financier. Je n'y reviens pas ! Sauf ci-dessous en bleu pour une vue de théorie juridique fondamentale...

Deux numéros de mon livre permettent tout de suite de contraster les vérités d'évidence sur, notamment, "le marché financier" : le marché existe et n'existe pas (variation juridique spéculative, n° 1508) et, quand il existe, il devient parfois assez vite compliqués (notion d'infrastructures de marché, le n° 1509 résume la situation).

Si le juriste apprécie un tableau qui, depuis le client, depuis l'ordre (dit de bourse), montre le cheminement vers le système informatique, sa sortie pour compensation et son exécution dans les systèmes de règlement livraison.

C'est un système très centralisé et donc par hypothèse très dangereux (avantage, quand le marché va très mal, on peut le fermer, du moins le temps que les esprits se reprennent et afin d'éviter une folie boursière).

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En théorie juridique, comme toute chose, le marché doit pouvoir supporter 5 ou 6 qualifications, ce qui est trop ignoré dans les Facultés où l'on pratique le mythe de "la" qualification (on passe sur les raisons de cette situation, qui est académique). En tout cas, cette structure juridique rend la réalité financière inaccessibles aux esprits généraux qui, pourtant, croient tout comprendre et, en général, sont à la tête de toutes les institutions financières... La seule conception économique des réalités est une catastrophe (disciplinaire, politique, législative et épistémologique). La loi atteste de la difficulté, même renforcée par les technocrates européens, le marché est formellement un inconnu. La simple liste des marchés qui existent possiblement n'est pas citée par le législateur : il ne sait pas donner cette liste. La compréhension de la finance (concept !) qui est une intrication (j'ai l'esprit quantique ce matin) d'économique et de juridique conduit à de l'incompréhension fondamentale qui marque toute la législation. C'est pour cela que vous n'aurez jamais dans aucun concours le sujet de dissertations les diverses définitions d'un marché : le sujet ne peut pas être donné il n'existe pas dans les livres !

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Droit bancaire et financier, éd. mare et martin.

1508. Concept institutionnalisé – Il y a une tendance à « institutionnaliser » le marché en désignant son surveillant ou organisateur (entreprise de marché, autorité de régulation). Comme la loi identifie mal les marchés sans institutions, l’organe « officiel » devient le critère du marché. Mais aucun texte n’exige qu’un marché dispose, pour exister, d’institutions (publiques, légales ou conventionnelles, soit de diverses personnes morales). Nul n’ignore l’existence des marchés de gré à gré, tel celui des contrats financiers à terme et la « terreur financière » qu’ils suscitent (quoique la tendance à l'institutionnalisation y existe aussi).

1509. Infrastructures de marchés – Les « infrastructures de marchés » sont les entités qui doivent transmettre des informations d’utilité publique à l’AMF (art. D. 632-5 et art. L. 632-17). Sont soumises à ces dispositions depuis 2010 : 1° Les entreprises de marché qui gèrent un marché réglementé défini à l'article L. 421-1, ou un système multilatéral de négociation défini à l'article L. 424-1 ; 2° Les dépositaires centraux d'instruments financiers mentionnés au 3° du II de l'article L. 621-9 ; 3° Les gestionnaires de systèmes de règlement interbancaires et les gestionnaires de systèmes de règlement et de livraison d'instruments financiers mentionnés à l'article L. 330-1 ; 4° Les chambres de compensation mentionnées aux articles L. 440-1 et suivants ; 5° Les sociétés commerciales qui assurent la centralisation et l'enregistrement électroniques des données des opérations sur instruments financiers. Est ainsi posé un principe de collaboration de ces personnes avec les autorités financières, un signe de la régulation imposant de l’information en retour.

Les institutions de marché et les négociations dites boursières (quelques points sur un cours de Droit de l'investissement), et le marché...

Droit bancaire et financier, éd. mare et martin.

§ 2 – Les institutions de marché

1532. Autorités publiques – Diverses autorités publiques déjà étudiées peuvent être vues comme des institutions de marché, et même de plusieurs marchés, notamment les régulateurs (AMF, AEMF, BDF) ou administrations (ministère de l’Économie, ministre de l’Économie). Mais, outre les infrastructures de marché (v. n° 1509), ce sont les personnes faisant fonctionner un marché réglementé qui sont à présenter : l’entreprise de marché, la chambre de compensation et leurs membres, tous devant collaborer avec le régulateur.

1533. Entreprise de marché – L'entreprise de marché effectue les actes afférents à l'organisation et l'exploitation de chaque marché réglementé qu'elle gère, et ce dès leur création (art. L. 421-2, CMF). Elle peut tenir divers types de marchés (MR, SMN ou SMNO), de titres (actions, obligations) ou contrats financiers (produits dérivés, ex-MATIF et ex-MONEP). Le ministre peut prononcer le retrait de la reconnaissance de l’un des marchés qu’elle tient (art. L. 421-5). C’est une société commerciale, soumise aux règles des établissements de crédit , qui doit avoir son siège social et sa direction effective en France. Devant veiller à ce que chacun remplisse « en permanence » les exigences du code, elle a une sorte de pouvoir de réglementation du ou des marchés qu’elle tient (avec approbation de l’AMF). Cela ressemble au pouvoir d’énoncer des règles et de prendre des décisions administratives mais, à défaut d’une mission de service public, ces décisions sont d’ordre privé et relèvent du juge judiciaire. Conformément à ces règles, elle a le pouvoir d’admission, de maintien ou de retrait de la cote des titres des émetteurs. Pour exécuter les négociations conclues dans son système, l’entreprise de marché collabore avec une chambre de compensation qui règle et livre les PSI. Elle doit adopter des dispositions internes pour prévenir les conflits d’intérêts.

1534. Membres du marché – Ce dispositif permet à l’entreprise de marché de surveiller les membres du marché (art. L. 421-2 et L. 421-12, CMF) qu’elle admet, sans pouvoir limiter leur nombre. Leur liste est communiquée à l’AMF à laquelle elle dénoncera, le cas échéant, ceux en faute . Admis pour accomplir les négociations, ce qui est un service d’investissement, ces membres doivent l’être sur des critères objectifs, transparents et non-discriminatoires (art. L. 421-17, CMF). PSI, ils doivent remplir des conditions légales (garantie d’honorabilité et de compétence, aptitude à la négociation, organisation appropriée, ressources suffisantes). Selon la loi, l’entreprise de marché est liée à eux par des relations de nature contractuelle.

1535. Chambres de compensation – Désormais agréés par la BCE sur proposition de l’ACPR, après avis de la BDF, ces établissements de crédit font approuver leurs règles de fonctionnement par l'AMF (art. L. 621-7, IV, CMF, v. tableau sous n° 453). Ces chambres assurent la surveillance des positions, l'appel des marges et, le cas échéant, la liquidation d'office des positions (art. L. 440-1, CMF). La loi permet ainsi d’exécuter les négociations par livraison de titres ou de monnaies . Les membres de ces chambres y traitent des opérations des marchés de titres (actions et obligations) ou des marchés dérivés. Ils ont des relations de nature contractuelles avec leurs membres. Les organismes adhérents sont soumis, pour leur activité de compensation d'instruments financiers, aux obligations législatives et réglementaires et aux contrôles et sanctions du CMF. Une chambre peut, pour des raisons commerciales légitimes, refuser l'accès d'un établissement d’un État de l’UE ou de l’EEE. L'AMF peut, elle, interdire qu’une entreprise de marché (ou un gérant de SMN) recoure à une chambre de compensation ou à un système de règlement et de livraison pour préserver le fonctionnement du marché.

1536. Membres de la chambre – Les membres et adhérents d'une chambre s'engagent à remplir, vis-à-vis d’elle, l'intégralité des obligations découlant des transactions inscrites au nom des tiers dans leurs comptes (art. L. 440-6, CMF). Le paiement des sommes dues à ce titre ne peut être différé, toute clause contraire est réputée non écrite. La garantie des chambres contribue à la sécurité du marché en augmentant la probabilité d’exécution des négociations. Tous dépôts des donneurs d'ordre auprès des PSI adhérents d'une chambre, en couverture ou garantie des positions prises sur un marché d'instruments financiers, sont transférés en pleine propriété à l’opérateur PSI au profit de la chambre. Cela garantit le règlement ou le solde débiteur constaté après une éventuelle liquidation d'office des positions, ou toute autre somme due au prestataire ou à la chambre. La liquidation d’office est une résiliation spéciale pour le cas où l’opérateur n’a pas constitué les sommes utiles ; elle s’opère en passant tout ordre utile pour garantir les professionnels mais aussi le marché. Aucun créancier d'adhérent de chambre ou prestataire ne peut se prévaloir d'un droit quelconque sur ces dépôts (même en vertu du livre VI du Code de commerce sur les difficultés d’entreprises) ; ils sont affectés à l’exécution des opérations du marché . Le marché prime l’économie réelle (art. L. 440-7, CMF).

1537. Enregistrements et compensations – La chambre de compensation enregistre dans ses comptes les négociations afin de les compenser, assumant la première tâche des services de back-office (les négociations constituent le front office, v. n° 681 et 682). La chambre appartient toutefois au processus de négociation. Du reste, le membre recevra tous les fonds et titres utiles (primes, titres, monnaie voire devises) pour dénouer l’ensemble des positions (d’acheteur ou de vendeur). Une majorité d’auteurs considère que la chambre, n’accomplissant pas seulement une tâche comptable, devient la contrepartie, c’est-à-dire le contractant. Cette compensation entre tous les adhérents, globale, pose la question de la nature du jeu des comptes et des inscriptions fongibles d’une pluralité des participants .


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Les règles marché d'une EM sont une chose originale ; elles doivent être transparentes et non-discriminatoires... laissant des relations contractuelles ! Avec le lien ci-dessous, vous voyez qu'un juriste de marché dépasse le CMF, le RGAMF...


Un accès aux règles de marché édictées par l'entreprise de marché

Code monétaire et financier

Article L. 421-10 (Modifié par Ordonnance n°2016-827 du 23 juin 2016)


En vue de la reconnaissance du marché réglementé, l'entreprise de marché établit les règles du marché. Ces règles, transparentes et non discrétionnaires, assurent une négociation équitable et ordonnée et fixent des critères objectifs en vue de l'exécution efficace des ordres. Elles fixent également les conditions d'admission des membres conformément aux dispositions de l'article L. 421-17.

Elles déterminent notamment les conditions d'accès au marché et d'admission aux négociations des instruments financiers et des actifs mentionnés au II de l'article L. 421-1, les dispositions d'organisation des transactions, les conditions de suspension des négociations d'un ou plusieurs instruments financiers et des actifs mentionnés au même II, les dispositions relatives à l'enregistrement et à la publicité des négociations.

Ces règles sont approuvées par l'Autorité des marchés financiers, qui vérifie leur conformité aux dispositions législatives et réglementaires applicables, ainsi que leur caractère proportionné aux objectifs poursuivis.

Les propositions de modifications de ces règles sont notifiées à l'Autorité des marchés financiers, qui les approuve après avoir effectué les vérifications prévues à l'alinéa précédent.

Les règles du marché sont publiées par l'entreprise de marché.




La suspension du marché ! Un mécanisme original, exceptionnel, mais ordinaire avec la crise du Coronavirus Covid-19 !

1576. Suspension – La suspension est un mécanisme par lequel les opérations ou situations juridiques cessent un certain temps de produire leurs effets. Le président de l’AMF a un pouvoir de suspension pour tout ou partie des négociations si un événement exceptionnel perturbe le marché (art. L. 421-16, I, CMF). C’est la fermeture du marché, de toutes les négociations. Une suspension au-delà de deux jours suppose un arrêté du ministre (le contrôle de cet acte par le juge administratif aidera à définir l’ordre public financier). L’EM a aussi un droit de suspension, il porte sur un instrument financier, non sur le marché.... (art. L. 421-15, CMF) . Le président de l’AMF peut également demander à l’EM la suspension d’un instrument financier (ibid., al. 2) ....

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