Financement participatif : les logiques juridiques du conseiller en investissement participatif (CIP)



Penser la logique d'une loi, c'est penser ses caractéristiques dans la cohérence du dispositif qui a été adopté. Le CIP, l'un des professionnels du financement participatif (FP), doit avoir une assurance professionnelle et être inscrit sur un registre ; cela importe, mais cela n'a rien à voir avec les logiques de cette "institution", de ce professionnel qui, comme cent autres professionnels, a ce genre d'obligations. Répondre A La Question (RALQ) impose de chercher deux ou trois logiques fortes et spécifiques au CIP.

RALQ : répondre à la question est toujours un défi

L'ordonnance n° 2014-559 du 30 mai 2014 a créé de nombreux et difficiles articles dans le Code monétaire et financier (CMF, L. 547-1 et s.) ; ce dispositif est devenu légal après ratification et a été complété par des textes réglementaires (CMF, D. 547-1 et s.). Ces deux séries de dispositions, du CMF, débutent justement sur les CIP. Elles mélangent finance, statuts professionnels, règles numériques, règles déontologiques, règles contractuelles spéciales - qui cependant n'excluent pas le droit commun ou même le droit des sociétés. La logique formelle du FP est d'aborder le sujet par les professionnels qui vont permettre sa réalisation. Le législateur s'en remet à des professionnels.

La logique profonde des institutions juridiques marque souvent leur appellation légale (si elles en ont une). Le "conseiller en investissement participatif", appellation de l'institution dont on demande les "logiques juridiques", est : être un conseiller, pour des investissements et selon la méthode du participatif.

Le participatif évoque le spontané des réseaux sociaux. Dans la loi, le participatif est transformé en intermédiation, on participe par un intermédiaire (ici le CIP, sinon l'IFP), c'est la première logique qui se relève. Le CIP intervient sur des investissements, la notion s'échappe du financement pour viser l'idée d'émission de titres qui est très commune, ce qui reste la logique du financement, moins celle du seul CIP. Enfin, le CIP est un conseiller, c'est son nom, sa mission, et elle est double ce qui la rend complexe.

Les logiques qui dominent sont donc celles de l'intermédiation (I) et du conseil (II).

NB un bon intitulé de plan repose sur un mot : une idée, un concept. L'habiller d'un intitulé plus long ne veut pas dire oublier le concept à traiter, ce qui déjà donne beaucoup de travail.


I. La logique de l'intermédiation : un paradoxe

La main du législateur qui accompagne est souvent un poison, la question restant à savoir s'il est mortel : trop réglementer c'est tuer. L'histoire du droit bancaire montre cependant des succès avec des dispositif légaux courts (le crédit-bail, les opérations sur créances professionnelles dites Dailly).

Avec le financement participatif, le gouvernement, donc "Bercy", s'en est donné à coeur joie par une longue ordonnance de 2014. Pour "valider" ce qui était naturel sur les réseaux sociaux, un contact direct, un financement direct : un financement sans intermédiaire ! On peut considérer que le CMF dénature le crowdfunding.

Ainsi, il a été créé un statut professionnel très contraignant (A) exigeant une exploitation par un site internet (B).

A. La logique de l'intermédiation par un professionnel

1. L'ombre du mandat, le modèle d'intermédiation

2. La réalité des prestations de services, le néo-modèle de l'intermédiation


B. La logique de l'intermédiation par un site internet

Le FP revient à étudier une forme de site internet qui est appelé plateforme, soit un site internet interactif.

1. Le site internet, une faculté en droit de la finance

Soyons moderne et parlons de "Droit de la Finance" puisque l'intermédiation du CIP n'est ni du droit bancaire (il n'est pas banque), ni du droit financier lequel relate en doctrine majoritaire les marchés financiers ("réglementés").

2. Le site internet, une obligation constitutive du FP



II. La logique du conseil : un défi

La mission est contradictoire. Mais le contradictoire est une pensée, une illusion de l'esprit humain. Il suffit de la nier par une autre pensée. La loi permet cela, marier les contraires jusqu'à les nier parfois. La loi assume cela (A) et croit nier la difficulté en recourant à ce qui est désormais un standard (du CMF), celui des règles déontologiques dites règles de bonne conduite (B).

A. Le CIP, un conseil de parties aux intérêts contradictoires


1. Conseiller l'émetteur de titres

2. Conseiller le souscripteur de titres

B. Le CIP, le respect des règles de bonne conduite conciliant les intérêts contradictoires

Certaines règles dites déontologiques concernent l'organisation et le statut professionnels, ce qui garantie indirectement les émetteurs et souscripteurs. Il suffit de les mentionner pour mieux insister sur les obligations, en vérité civiles, qui influencent l'opération.

1. Des règles de principes et d'organisation

2. Des règles de détail pour les opérations


Conclusion. Le propos signale les premières logiques juridiques qui ont animé le dispositif du CMF. On notera que le FP avait initialement une fonction de financement accessoire, souvent en pratique, et encore plus au plan de la politique favorisant les financements. Or, après être passé de 1 à 2,5 M€, les opérations possibles sont désormais de 8 M€. La logique d'investissement a été écartée in limine car elle est commune aux autres émissions de titres qui sollicitent des investisseurs, et qu'elle n'est qu'un aspect du FP. Le moins que l'on puisse dire, désormais, c'est que le caractère de financement accessoire cède, tant il est vrai que 8 M€ constitue une somme extraordinaire pour la plupart des entreprises ! Paradoxalement, la logique du financement se renforce pour transformer les CIP en acteurs du financement de premier plan. Le règlement européen qui vient d'être adopté ne modifie pas radicalement l'opinion quoiqu'il change le droit.

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