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François FILLON évoque le risque pour la France d'un accident financier majeur, sans doute à raison...



François FILLON a évoqué il y a quelques jours le risque financier majeur que la France court. On est enclin à croire que cet avertissement n'est pas un coup médiatique mais une crainte réelle, sans doute fondée par divers avis et conseils.

François FILLON, Les Echos
François FILLON au Figaro

Ce qui est certain, c'est que la politique de la BCE, qui a peu fait de cas du droit européen, est un facteur de risque : les décisions de politique monétaire dont nous avons beaucoup discuté sur ce blog, depuis des années..., seront l'objet d'une décision de la Cour de justice de l'Union européenne (nous avons brossé une rapide analyse de la situation dans Droit bancaire et financier, n° 359, 380 et spécialement n° 389) :

La BCE devant la CJUE, un excellent article de La tribune

De quoi s'agit-il ? De ce dont ni les élus ou responsables publics ne veulent entendre parler, ni un grand nombre de citoyens. Les responsables publics sont habitués à vivre dans les déficits depuis 30 ans, et l'augmentation des dettes des collectivités territoriales a montré qu'il ne savait pas gérer autrement. La conséquence est que l'ensmble des déficits publics ne cessent d'augmenter. Une agence de notation vient de placer le France sous surveillance négative, elle pourrait donc à terme d'un semestre ou d'un an dégrader sa note.

Standard & Poors pourrait à terme supprimer son AA à la France

Pour certains, l'Union bancaire (un ensemble disparate d'institutions, mécanismes et très centralisés sur la BCE) a coupé court aux risques financiers liés au budget. On pourrait le croire quand on sait que la France émet parfois des obligations d'Etats, pour s'endetter, à taux négatif. Ses déficits ne se résorbent pas et tous les investisseurs de la planète lui prêtent de l'argent ! Les budgets pourront donc toujours être alimentés ! Le risque budgétaire a été transformé en risque de marché ; or, sur ce terrain, la BCE interviendra s'il le faut.

Elle achètera des obligations d'Etats, le cas échéant ceux de la France (c'est en procès à la CJUE on vient de le dire).

Voyez le grand optimisme d'un analyste

La situation ne manque pas de sel. Ce sont qui détestent la finance, la "gauche dure", qui entendent jouer un tour de passe-passe financier. Voilà les plus protestataires enjoués par les manoeuvres de Mario DRAGHI qui, notons-le, ne manque pas de talent. Tout le problème est de savoir quand on s'arrête de jouer avec le système. Et le problème a les formes de l'Allemagne :

- elle n'acceptera pas que les dettes continuent de s'amasser et que l'euro glisse à la baisse sans perspective de stabilisation ;
- elle finira par dire non, stop, un jour ; l'Allemagne n'aura pas besoin de saisir la Justice européenne pour faire juger contraires aux traités diverses décisions de la BCE ; elle le fera en annexe de sa position qui consistera à dire STOP !

Une position ferme de l'Allemagne affichée au plan international aura sur le marché international un grand effet de conviction, et juste en quelques semaines : les investisseurs internationaux comprendront qu'il n'est plus possible de prêter à des pays européens, de la zone euro, sans regarder leurs comptes. Cette prise de conscience s'opèrera en quelques jours ou semaines : le revirement ne se fera ni en 24 heures mais il sera irréparable. Aucune annonce ne pourra alors inverser la défiance des investisseurs. Après la confiance, la défiance. C'est comme cela que ça marche.

Il me semble que François FILLON ait donc raison de souligner le lien entre accident financier et éclatement de la zone euro. Cette dernière perspective me semblait jusqu'alors illusoire. Mais la France ne parvient pas à s'améliorer et la classe politique, sous toutes ses formes, composantes et niveaux, est incapable d'adopter un discours global cohérent, crédible et ferme qui simultanément allie des décisions yant une portée.

Les déficits continuent d'augmenter or il est inéluctable que cela doive s'arrêter un jour.

Chaque fois qu'une réforme est annoncée, sont annoncées également des mesures de compensations qui semblent proches du délire.

Un accident financier et l'éclatement de la zone euro ce serait surtout une crise économique sévère.

Il faut dire ce qu'est une crise économique, parce que les Français ne l'ont pas en tête, liée à un accident financier. Il faut le dire parce que personne n'ose le dire - je me souviens de Michel SAPIN lançant que le pays était en faillite il y a quelques mois, il n'a eu aucun soutien. Aucun. On lui reproche aujourd'hui un budget qui glisse, mais ce n'est pas le ministre qui glisse, c'est toute la France qui réalise la glissade !

Alors parlons clair.

Cette crise exigerait de remettre la société française (les gens et les entreprises, et associations..., bref nous tous) au niveau de vie que nous méritons, et pour cela, à très brève échéance, on aurait 20 % de dette publique de plus, une augmentation de tous les impôts de 20 %, une augmentation du nombre de chômeurs d'un million et, si nous partons avec une autre monnaie, un franc qui vaudrait en un semestre 50 % de l'euro géré par les allemands.

En sus, à défaut d'avoir su, tous les deux ans, baisser toutes sortes de dépenses de 1 ou 2 %, il faudra les baisser de 10 % en 10 mois.

Le crises sont faites pour cela : dire et faire ce que l'on n'a pas pu dire et faire en "temps normal".

Si l'Allemagne et l'europe disent stop à la dérive budgétaire française, ils rendront un sérieux service à notre pays et à l'Europe. La seule question est donc de savoir si les allemands ont été contaminés par le virus du bla-bla politique et de l'incapacité à prendre des décisions, celle-là relevant de l'Union européenne.


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