On avait souligné, ici même, que l'AMF méconnaissait l'ordre public financier Sur l'ordre public financier, un propos étonnant du président de l'AMF A sa décharge, on dira que les débats sur l'ordre public sont parfois peu productifs.
Les deux juges de cassation peuvent employer l'expression de façon surprenante. A tout prendre, qu'importe que l'AMF ignore la notion dès lors qu'elle élabore dans son RGAMF un bon ordre public financier...
Celui-ci serait en cause avec les ICO de tokens opérés par une blockchain ce qui a mobilisé et mobilisé l'AMF.
On en doutera pourtant tout en doutant de la compétence de l'AMF. Les lecteurs intéressés se reporteront à notre analyse qui sera publiée par les éditions Lexbase dans un dossier consacrés aux ICO.
Dans cette problématique, le débat sur la nature des titres financiers remonte à la surface.
L'AMF semble contrainte à faire de la théorie juridique. Or l'AMF oublie qu'un titre financier peut ne pas incorporer ou représenter une créance de somme d'argent (ou, si l'on préfère : un titre financier peut ne pas se fonder une créance de somme d'argent).
On peut pareillement le dire pour la notion en déclin de valeurs mobilières. Notre collègue Thierry Bonneau argumente pourtant en ce sens dans le premier "Repère" 2018 de la RDBF. Nous voudrions offrir un repère autre.
Ramener les titres financiers au critère de la somme d'argent est un net recul de la notion. L'économie de la tokenisation n'en demande pas tant. Cette position est du reste soudaine : si les titres financiers étaient simplement et fondamentalement des titres de créance d'argent, on l'aurait dit aussi nettement depuis des décennies. On insistait plutôt sur leur caractère collectif, fongible et négociable...
Ainsi et en effet, nombre de titres ne donnent pas droit à une créance de somme d'argent. Un titre peut donner le seul droit de souscrire un autre titre. Le droit d'obtenir un titre n'est pas une créance de somme d'argent. Par exemple le bon de souscription autonome, émis autonome (BSA) ou devenu autonome (par exemple OBSA, divisé en obligation et BSA) ; comme le droit préférentiel de souscription qu'on a dû admettre en valeur mobilière et coter. L'action est également un curieux titre de créance si on ne dit que cela d'elle*.
On ne comprend donc pas cette doctrine, sauf à dire que le droit de souscrire s'assimile à une créance de somme d'argent car ce droit permet seulement d'obtenir un titre. Mais c'est purement et simplement effacer le droit de souscrire...
En tout cas, regarder la substance des titres est une démarche nouvelle pour nombre d'acteurs. On félicite l'AMF de s'interroger sur le sujet. La proposition que l'AMF devrait faire sur les ICO est intéressante qui tient compte de la nature des tokens : idée d'un régime de visa facultatif (belle intervention de Benoît de JUVIGNY à l'Assemblée nationale).
La notion de titre financier n'a donc pas pour critère la créance de somme d'argent...
Cette question en vérité assez simple fait se demander ce que sera le débat sur les ICO et tokens quand viendront des notions ou points qui ont encore mieux été occultés. Ainsi, quid de la négociabilité du token ? On sait que la négociabilité a elle été passée par la fenêtre : le nouveau Code civil l'ignore sans avoir pu abroger 100 ans de jurisprudence la réglant... ICO et tokens passent sans doute par la très riche finance de la fin du 19e siècle et du début du 20e...
Voilà en tout cas le débat sur la substance des titres relancé !
A retarder les questions fondamentales, et celle sur le negotium des titres en est une, on ne fait que... On ne fait que les... retarder !
--------------
* L'action de société peut être présentée, dans une fin pédagogique, de titre de créance, ce qui ramène à la réalité économique le "propriétaire" d'action ; mais cette désignation est très vague et réductrice de ses qualités et caractères (l'action est selon nous la position de l'associé dans le contrat de société) ; l'action n'est pas un titre portant sur une somme d'argent : les versements qui existeront dépendent d'éventualités (dont celle d'éviter la faillite) et des décisions des organes sociaux (que ce soit pour les dividendes, les réductions de capital, les restitutions de capital ou l'octroi du boni de liquidation : et dans ces dernières périodes on peut douter que l'action existe encore... ). L'action est, en outre, un droit indivisible qui agrège le droit de vote et transcende donc l'étroite notion de titre de créance de sommes d'argent.
Les deux juges de cassation peuvent employer l'expression de façon surprenante. A tout prendre, qu'importe que l'AMF ignore la notion dès lors qu'elle élabore dans son RGAMF un bon ordre public financier...
Celui-ci serait en cause avec les ICO de tokens opérés par une blockchain ce qui a mobilisé et mobilisé l'AMF.
On en doutera pourtant tout en doutant de la compétence de l'AMF. Les lecteurs intéressés se reporteront à notre analyse qui sera publiée par les éditions Lexbase dans un dossier consacrés aux ICO.
Dans cette problématique, le débat sur la nature des titres financiers remonte à la surface.
L'AMF semble contrainte à faire de la théorie juridique. Or l'AMF oublie qu'un titre financier peut ne pas incorporer ou représenter une créance de somme d'argent (ou, si l'on préfère : un titre financier peut ne pas se fonder une créance de somme d'argent).
On peut pareillement le dire pour la notion en déclin de valeurs mobilières. Notre collègue Thierry Bonneau argumente pourtant en ce sens dans le premier "Repère" 2018 de la RDBF. Nous voudrions offrir un repère autre.
Ramener les titres financiers au critère de la somme d'argent est un net recul de la notion. L'économie de la tokenisation n'en demande pas tant. Cette position est du reste soudaine : si les titres financiers étaient simplement et fondamentalement des titres de créance d'argent, on l'aurait dit aussi nettement depuis des décennies. On insistait plutôt sur leur caractère collectif, fongible et négociable...
Ainsi et en effet, nombre de titres ne donnent pas droit à une créance de somme d'argent. Un titre peut donner le seul droit de souscrire un autre titre. Le droit d'obtenir un titre n'est pas une créance de somme d'argent. Par exemple le bon de souscription autonome, émis autonome (BSA) ou devenu autonome (par exemple OBSA, divisé en obligation et BSA) ; comme le droit préférentiel de souscription qu'on a dû admettre en valeur mobilière et coter. L'action est également un curieux titre de créance si on ne dit que cela d'elle*.
On ne comprend donc pas cette doctrine, sauf à dire que le droit de souscrire s'assimile à une créance de somme d'argent car ce droit permet seulement d'obtenir un titre. Mais c'est purement et simplement effacer le droit de souscrire...
En tout cas, regarder la substance des titres est une démarche nouvelle pour nombre d'acteurs. On félicite l'AMF de s'interroger sur le sujet. La proposition que l'AMF devrait faire sur les ICO est intéressante qui tient compte de la nature des tokens : idée d'un régime de visa facultatif (belle intervention de Benoît de JUVIGNY à l'Assemblée nationale).
La notion de titre financier n'a donc pas pour critère la créance de somme d'argent...
Cette question en vérité assez simple fait se demander ce que sera le débat sur les ICO et tokens quand viendront des notions ou points qui ont encore mieux été occultés. Ainsi, quid de la négociabilité du token ? On sait que la négociabilité a elle été passée par la fenêtre : le nouveau Code civil l'ignore sans avoir pu abroger 100 ans de jurisprudence la réglant... ICO et tokens passent sans doute par la très riche finance de la fin du 19e siècle et du début du 20e...
Voilà en tout cas le débat sur la substance des titres relancé !
A retarder les questions fondamentales, et celle sur le negotium des titres en est une, on ne fait que... On ne fait que les... retarder !
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* L'action de société peut être présentée, dans une fin pédagogique, de titre de créance, ce qui ramène à la réalité économique le "propriétaire" d'action ; mais cette désignation est très vague et réductrice de ses qualités et caractères (l'action est selon nous la position de l'associé dans le contrat de société) ; l'action n'est pas un titre portant sur une somme d'argent : les versements qui existeront dépendent d'éventualités (dont celle d'éviter la faillite) et des décisions des organes sociaux (que ce soit pour les dividendes, les réductions de capital, les restitutions de capital ou l'octroi du boni de liquidation : et dans ces dernières périodes on peut douter que l'action existe encore... ). L'action est, en outre, un droit indivisible qui agrège le droit de vote et transcende donc l'étroite notion de titre de créance de sommes d'argent.