Le Conseil d'Etat (9 juin 2010) sauve un micro-parti ! La notion de financement, un univers en pleine expansion...



Le Conseil d'Etat (9 juin 2010) sauve un micro-parti ! La notion de financement, un univers en pleine expansion...
Voilà une affaire bien dans le vent de l'actualité. Pour 4 000 euros, la Commission des comptes de campagne avait décidé d'exclure "Cap sur l'Avenir 13" de la vie politique... nationale ? Non. Marseillaise !

D'un côté, en effet, voilà ce parti avec son association de financement (mandataire légal et obligatoire). Sauf quelques initiés au pastis marseillais, personne n'avait jamais entendu parler de Cap sur l'Avenir 13. Selon le journal la Provence (on insiste, selon ce journal), JC GAUDIN et Renaud MUSELIER ont créé deux micros-partis, dont Cap sur l'avenir 13, lequel aurait un budget d'un peu plus de 500 000 euros. De quoi se payer quelques affiches, je vous le dis...

Voyez le lien :

Article de la Provence

De l'autre côté, la Commission nationale des comptes de campagne. Elle agrée et contrôle les partis. Elle agace aussi parfois, quelques candidats, à discuter pour 50 euros un compte de campagne quand sur d'autres griefs qui auraient des implications importantes elle semble éluder.

Ici, la somme n'était pas négligeable, sans être très importante il faut le reconnaître. De l'argent étant effectivement sorti du compte bancaire de l'association de financement du parti : il manquait les justificatifs (factures, notes, tickets de train...)..

Ce point précis a été à l'origine de la difficulté, les commissaires aux comptes ayant fait des réserves (soit une certification des comptes avec réserves). La Commission en en tiré une conséquence radicale et n'a donc pas validé lesdits comptes, en sorte que Cap sur l'avenir 13 ne pouvait plus :

- ni financer un candidat ou un autre parti,
- ni recevoir à l'avenir de dons défiscalisés.

Son avenir était dans son dos !

L'association ne pouvait désormais que faire de la propagande thématique... or ce n'est pas l'objet d'un micro-parti. L'objet d'un micro-parti c'est que les citoyens puissent donner à la fois à un grand parti de droite (ou de gauche) et à la fois à un petit parti.

Divers anciens ministres ont monté leur micro parti !

La presse en a largement parlé ces derniers temps. Si demain leur parti national ne veut plus les financer, ils pourraient encore régner dans leur fief... eh oui, la République a récréer les fiefs du Moyen Age... Un micro-parti sert donc à collecter de l'argent et à financer des élections.

La décision de la Commission privait donc les intéressés d'un moyen d'action ; elle a donc été attaquée devant le Conseil d'Etat. Dans sa grande sagesse, la haute juridiction rétablit ce parti politique (micro-parti) dans ses droits et prérogatives financières ! Voilà un bon exemple de l'expansion, aux frais de la princesse, des partis politiques financés publiquement (défiscalisation et subventions)

Face aux considérations juridiques du juge administratif, on partira de la réalité qui n'exclut pas quelques hauts principes juridiques.

On espèrerera d'abord que ces 4 000 euros n'ont pas servi à financer un candidat sur, par exemple, une élection cantonnale car, sur un tel scutin, avec 4 000 euros, vous avez 3 salariés qui pendant 3 semaines tractent à temps plein pour vous.

Cela n'est pas neutre, c'est de nature à influencer quelques centaines d'électeurs et faire la différence. Le citoyen que je suis n'apprécierait pas, s'il était candidat, d'avoir en face de lui un candidat "sur-financé", personne ne pouvant l'identifier puisqu'on ne sait pas où vont (absence de factures) certaines sommes de certains partis ! Quelle garantie a-t-on que le système (notion !) de financement PUBLIC respecte l'égalité... entre candidats. Sachant qu'on ne parle même plus de règle juridique, mais de principes politiques faisant la démocratie !

On dira en outre, sans plus d'analyse de droit administratif, peuchère nous n'en sommes pas capables, que cette jurisprudence (V. ci-dessous) ne rassure pas le citoyen sur un autre plan. Et même elle l'inquiète ! On redoutera que l'on passe de 4 000 euros à 5 000, puis à 10 000 et qu'on menace nettement la transparence financière qui est tout l'objectif de la loi.

Transparence que nous dirons due de façon absolue, et que nous jugeons absolument due.

Aujourd'hui on sort 4 000 euros sans justificatif, demain on en rentrera 10 000 sans davantage de justificatifs... Mais le Conseil d'Etat doit savoir par son art de la pratique que le liquide n'existe plus, spécialement à Marseille.

Est-ce un nouveau principe de transparence que le Conseil d'Etat a appliqué ? On voit mal dans son arrêt un beau principe général - du type transparence ou égalité.

Cela se fait, de surcroît, dans un contexte général discrétitant la solution donnée.

On rappellera que la Commission nationale des comptes des comptes de campagne et du financement de la vie publique est au coeur de la dérive des petits partis politiques, dits micros-partis. Ce thème a défrayé la chronique ces derniers mois ; un bon nombre de ces partis semble directement détourner les contraintes et limites de grands partis auxquels appartiennent leurs fondateurs.

Les Français devaient donc s'attendre, dans un tel litige, d'un coup de barre vers la rigueur comptable, morale et politique. Si le Conseil d'Etat avait laissé passé cette sanction, le législateur n'aurait pas pu le contredire !

L'opinion publique aurait applaudi !

Le juge administratif interprète a minima les obligations comptables en de simples obligations de dépôt. Prenez les comptes, dit-il à la Commission, et regardez les de loin ! S'ils sont manifestement incohérents, là vous pourrez sanctionner (en respectant les droits de la défense). Sinon, vous n'avez pas le pouvoir de sanction, même si le système (de financement) fuit de façon très visible.

Las, le Conseil d'Etat ne contribue pas à réguler la vie publique penseront d'aucuns.

La Commission est elle aussi atteintre. Là elle n'a eu aucune idée technique pour susciter l'intérêt et endiguer la prolifération des partis (300 partis politiques en France !), ici elle tente la chose en vain en raison - jugeront certains - du juridisme du Conseil d'Etat.

La Commission est perdante - et le citoyen avec elle - qui aura manqué d'assoir, dans le temps, son autorité par un ajustement progressif, au fil des ans, dedécisions qui auraient dû, au fil du temps, faire preuve de plus en plus d'autorité et de finesse juridique (et comptable, mais la comptabilités résulte des règles...).

Les citoyens restent donc avec le problème d'une vie poltique avec 300 partis politiques !

Soit 80 % qui ressemblent à des officines locales sans candidat propre (ils sont en réalité investi par un "vrai parti national"), ni idée, ni doctrine, ni élus (ils appartiennent aussi à l'autre parti)... et de la défiscalisation et du financement à tout-va.

Non comptant de bien payer leurs élus, les citoyens payent tout ce qui largement les entourre...

Tout cela est très décevant et ne s'explique pas par de l'ingénierie juridique...

Tous les élus et tenanciers de micros-partis peuvent donc nous contacter pour de fins montages juridico-financiers. Puisqu'on y est invité !


Post scriptum ("PS" était équivoque) : les honoraires sont perçus sans facture en dessous de 4 000 euros, avec en dessus...



TEXTE EMPRUNTE A LA BASE LEGIFRANCE

Conseil d'État

N° 327423
Publié au recueil Lebon
Section du Contentieux
M. Stirn, président
M. Christian Fournier, rapporteur
M. Geffray Edouard, commissaire du gouvernement
SCP COUTARD, MAYER, MUNIER-APAIRE, avocats

lecture du mercredi 9 juin 2010
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
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Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 27 avril, 20 juillet et 6 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION CAP SUR L'AVENIR 13, dont le siège est 39, rue Sainte Cécile à Marseille (13005), représentée par son président en exercice ; l'ASSOCIATION CAP SUR L'AVENIR 13 demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 23 octobre 2008, notifiée le 28 novembre 2008, par laquelle la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a constaté qu'elle n'avait pas satisfait, pour l'exercice 2007, aux obligations prévues par l'article 11-7 de la loi du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique et la décision du 23 février 2009, notifiée le 27 février 2009, par laquelle la commission a rejeté son recours gracieux contre la décision du 23 octobre 2008 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution, notamment son article 4 ;
Vu le code électoral ;
Vu la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christian Fournier, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Coutard, Mayer, Munier-Apaire, avocat de l'ASSOCIATION CAP SUR L'AVENIR 13,
- les conclusions de M. Edouard Geffray, Rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Coutard, Mayer, Munier-Apaire, avocat de l'ASSOCIATION CAP SUR L'AVENIR 13 ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la loi du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique : Les partis et groupements politiques se forment et exercent leur activité librement ; qu'aux termes de l'article 11-7 de la même loi : Les partis ou groupements bénéficiaires de tout ou partie des dispositions des articles 8 à 11-4 ont l'obligation de tenir une comptabilité. Cette comptabilité doit retracer tant les comptes du parti ou groupement politique que ceux de tous les organismes, sociétés ou entreprises dans lesquels le parti ou groupement détient la moitié du capital social ou des sièges de l'organe d'administration ou exerce un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion. / Les comptes de ces partis ou groupements sont arrêtés chaque année. Ils sont certifiés par deux commissaires aux comptes et déposés dans le premier semestre de l'année suivant celle de l'exercice à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques instituée à l'article L. 52-14 du code électoral, qui assure leur publication sommaire au Journal officiel de la République française. Si la commission constate un manquement aux obligations prévues au présent article, le parti ou groupement politique perd le droit, pour l'année suivante, au bénéfice des dispositions des articles 8 à 10 de la présente loi. ;

Considérant que, par les dispositions précitées de l'article 11-7 de la loi du 11 mars 1988, le législateur a imposé aux partis et groupements politiques des obligations comptables, dont la méconnaissance les prive, pendant l'année qui suit le constat de ce manquement, du financement public prévu par les articles 8 à 10 de la loi et de la possibilité de financer eux-mêmes des campagnes électorales et d'autres partis ou groupements politiques ; que, pour exercer la mission de contrôle que lui confient ces mêmes dispositions, dans le respect de la liberté constitutionnellement garantie que rappellent les dispositions de l'article 7 de la loi, il incombe à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques de vérifier que les partis ont déposé devant elle, en temps utile, des comptes annuels, après les avoir fait certifier par deux commissaires aux comptes ; qu'elle doit en outre s'assurer que ces comptes correspondent, au vu des éléments d'information dont elle dispose, à l'ensemble du périmètre défini par la loi, d'une part en contrôlant que les organismes, sociétés ou entreprises dans lesquels les partis ou groupements politiques détiennent la moitié du capital social ou des sièges du conseil d'administration ont été pris en compte, d'autre part en appréciant si des organismes sur lesquels les partis ou groupements politiques exercent, selon elle, un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion n'ont pas été omis ; qu'il lui appartient enfin de veiller à ce que l'image que les comptes certifiés donnent de la situation financière des partis ou groupements politiques n'est pas entachée d'une incohérence telle avec les données extérieures à la comptabilité des partis dont elle dispose par ailleurs, que ces partis devraient être regardés comme ayant manqué à leur obligation de déposer leurs comptes certifiés ; qu'elle ne saurait en revanche, sans excéder sa compétence, constater, en l'absence de toute incohérence manifeste, qu'un parti ou groupement politique a manqué à ses obligations, alors même qu'il a déposé en temps utile des comptes certifiés correspondant au périmètre fixé par la loi, que cette certification soit établie sans réserves ou qu'elle soit assortie de réserves, même formulées sur des points identiques plusieurs années de suite ;

Considérant, par ailleurs, que, si elle envisage de constater qu'un parti ou groupement politique a manqué à ses obligations, la commission doit, conformément au principe général des droits de la défense, le mettre en mesure de s'expliquer, selon des modalités qu'il lui appartient de définir et de mettre en oeuvre sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'association CAP SUR L'AVENIR 13, formation politique soumise aux dispositions de la loi du 11 mars 1988, a déposé devant la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, le 30 juin 2008, ses comptes pour l'année 2007, certifiés par deux commissaires aux comptes ; que ceux-ci avaient formulé des réserves, tirées de ce que, sur les 281 155 euros de charges qui figuraient au compte de résultat d'ensemble, des justificatifs de chèques représentant 4 525 euros de dépenses n'avaient pu être présentés, en précisant que, les décaissements correspondants étant certains, ils avaient été comptabilisés en charges de l'exercice ; que, par une lettre du 16 septembre 2008, le président de la commission a fait savoir au président de l'association que, dès lors que les commissaires aux comptes avaient formulé des réserves sur un point identique en certifiant les comptes des exercices 2005 et 2006, la commission pouvait être conduite à constater que l'association n'avait pas satisfait à ses obligations, s'il s'avérait qu'elle n'avait pas cherché à remédier aux causes ou problèmes à l'origine des réserves ; qu'en l'absence de réponse à cette lettre, la commission a décidé, lors de sa séance du 23 octobre 2008, que l'association CAP SUR L'AVENIR 13 n'avait pas satisfait, pour l'exercice 2007, aux obligations prévues par l'article 11-7 de la loi du 11 mars 1988 ; que, dans sa lettre de notification du 28 novembre 2008, le président de la commission a rappelé à l'association, qui n'avait bénéficié d'aucun financement public, que cette décision lui interdisait, pour l'année 2008, de contribuer au financement d'une campagne électorale ou d'un autre parti politique ; que l'association a alors introduit un recours gracieux le 29 janvier 2009, en produisant des factures pour justifier la plus grande partie des 4 525 euros de dépenses mentionnés ci-dessus et en annonçant la production prochaine des ultimes justificatifs ; que, par une décision du 23 février 2009, la commission a rejeté ce recours, en indiquant notamment à l'association que le lien entre les factures produites et les dépenses visées par les réserves des commissaires aux comptes ne pouvait être établi par la commission et qu'en tout état de cause il n'était pas de sa compétence de connaître des pièces justificatives de dépenses des partis politiques, que seuls les commissaires aux comptes peuvent apprécier au regard de l'ensemble de la comptabilité du parti ;

Considérant qu'il est constant que l'association CAP SUR L'AVENIR 13 a déposé en temps utile devant la commission ses comptes de l'exercice 2007 certifiés par deux commissaires aux comptes ; que la commission n'a relevé ni que ces comptes ne correspondaient pas au périmètre défini par la loi, ni qu'ils donnaient une image de la situation financière de l'association entachée d'une incohérence telle avec les données extérieures à sa comptabilité dont elle disposait par ailleurs, que cette association aurait manqué à son obligation de déposer ses comptes certifiés ; qu'en se fondant sur la circonstance que l'association n'avait pas expliqué si elle avait cherché à remédier aux causes ou problèmes à l'origine des réserves formulées par les commissaires aux comptes sur un même point pour la troisième année consécutive, pour constater qu'elle avait manqué aux obligations prévues par les dispositions de l'article 11-7 la loi du 11 mars 1988, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a excédé la compétence que lui attribue la loi ; que, par suite, l'association CAP SUR L'AVENIR 13 est fondée à demander l'annulation de la décision de la commission du 23 octobre 2008 et de sa décision du 23 février 2009 rejetant son recours gracieux ;


D E C I D E :
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Article 1er : La décision du 23 octobre 2008 de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et sa décision du 23 février 2009 rejetant le recours gracieux formé par l'association CAP SUR L'AVENIR 13 sont annulées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION CAP SUR L'AVENIR 13, à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

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