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Natixis Assets Management écope de 35 M€ de sanction pécuniaire... pour l'exemplarité ? (CS AMF, 25 juillet 2017)



La Commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers (CSAMF) vient d'infliger une sanction pécunaire qui est jugée record par certains observateurs (V. Téchené, Lexbase). La sanction pécuniaire concerne Natixis Assets Management ("NAM dans la décision), l'AMF avait du reste eu l'écho de la presse pour annoncer une sanction exemplaire.

La Tribune, quand la sanction était prédite sinon annoncée...

On connaît la CSAMF qui est une pièce d'une partie de la régulation financière (H. Causse, Droit bancaire et financier, pp. 261 à 267, n°463 à 479) au domaine de compétence à la fois large et étroit - toute la complexité de la régulation financière.

Le griefs reprochés ont abouti à priver les fonds administrés d'environ 45 M€ selon la décision reproduite ci-dessous.

La décision se lit bien... Elle sera sans doute commentée pour ses points de procédure et de fond puisque la technique des fonds à formule est en cause - le droit des OPC est sans doute le plus difficile qui soit dans le CMF... On en vient à un point qui saute à l'œil (quelques phrases sont en gras dans le texte de la décision reproduite ci-dessous).

On remarque en effet que l'une des motivations semble satisfaire le besoin de faire de cette décision un exemple... de sévérité pour la communauté de la finance, ce qui étonne.

Natixis Assets Management écope de 35 M€ de sanction pécuniaire... pour l'exemplarité ? (CS AMF, 25 juillet 2017)

La CSAMF tient compte avec ces mots, selon nous, de la "personnalité" de la personne morale... Mais les personnes morales n'ont pas de (véritable) personnalité qui vaille compréhension, indulgence ou sévérité.

Les fautes tiennent la plupart du temps à 4 ou 5 personnes physiques - dans la société et dans le groupe (...), voire à une organisation (bien loin des personnes) interne ou externe. Sur ce dernier point, on note que le groupe est d'ailleurs visé in limine de la décision jusqu'à l'organe central qui, banque, est néanmoins chargé de diverses missions de service public :

"Le capital de NAM est détenu en totalité par Natixis Global Asset Management (ci-après « NGAM »), elle-même filiale à 100 % de Natixis SA dont le capital est détenu à 71,46 % par Banques Populaires-Caisses d'Epargne."

BPCE ! Cela se note.

Mais voyez cette motivation qui étonne :

"Ils (les faits) ont été commis par l'un des acteurs importants de la gestion d'actifs en France..."

On a du mal à comprendre cette motivation, ce membre de phrase (la phrase entière est : "Ils ont été commis par l'un des acteurs importants de la gestion d'actifs en France et se sont échelonnés sur une durée de trois ans").

Voilà la personnalité visée ! Voilà la personnalité qui devient un élément important. L'importance de la personnalité devient un facteur de la construction de la sanction. Comme le souhaitait la partie poursuivante, l'AMF.

L'importance économique est visée, elle, et cette dernière apposition marque la distinction, plusieurs alinéas plus bas, en une phrase formant un alinéa (...) : "Enfin, il est relevé que NAM a dégagé un résultat net de 90 millions d'euros en 2014 et de 111 millions d'euros en 2015".

Cette dernière motivation est plus orthodoxe.

L'état financier d'un acteur étant un facteur de la proportionnalité que la sanction doit incorporer. Il s'agit de proportionner la sanction à l'importance financière de l'entreprise poursuivie.

Mais alors quelle est donc l'importance visée plus haut et déjà critiquée ? Sinon que celle d'une personnalité illusoire de la personne morale ?! Illusoire en pure théorie juridique comme en droit positif.

La CSAMF a-t-elle trop écouté l'AMF dans sa volonté d'obtenir une décision exemplaire ?

On s'étonne sur un autre point qui a amené cette décision.

Au lieu de raisonner en termes de politique de régulation, l'AMF a emprunté le langage des responsables politiques qui n'hésitent pas à réclamer des sanctions exemplaires en méconnaissance de tous les principes juridiques, et pour compenser une politique qui leur incombe. Là, il s'agit de la politique pénale, ici de la politique de régulation financière qui, on le rappelle, selon l'AMF elle-même, ignore l'ordre public financier... c'est un autre étonnement.

La position de l'AMF sur l'ordre public financier, cliquez ici

Reprenons un peu les choses à la base.

S'agissant de professionnels soumis à la régulation financière et à des obligations de compliance, soit à un droit très précis et très exigeant, qui nous amène à proposer la reconnaissance d'un véritable pouvoir de régulation (ouvrage précité), cette motivation est superfétatoire et finalement troublante. On ne peut pas la considérer comme simplement surabondante.

Dans le domaine du poids des sanctions, l'erreur de droit influence l'importance de la sanction et donc sa légalité.

Le thème de la sanction, de la prévisibilité des sanctions est d'ailleurs actuellement discuté. La sanction est à la mode dans nombre d'autorités et la course au record semble s'être engagée. L'Etat impuissant croit à tort tenir sa rénovation à travers des démembrements eux-mêmes démembrés (en quasi-juge, en médiateur...).

Mais, donc. Au titre de la prévisibilité des sanctions, les grands groupes doivent-ils être convaincus qu'ils risquent à tout instant de servir d'exemple ? La Régulation prétend-elle maintenir à distance la Justice ?

Plus au fond encore, cette motivation peut gêner. Quel que soit l'acteur professionnel, le professionnalisme requis des sociétés agréées en vertu du CMF doit être parfait. Qu'il soit petit, moyen ou grand. En effet, est toujours en cause l'argent des clients confiés sans contrepartie aux professionnels (c'est à cela que tient la magie de la finance).

Mais ce n'est pas ce qu'écrit la CSAMF qui dit, en substance, je vais infliger des sanctions importantes parce que vous êtes un acteur important et symbolique de la gestion d'actifs ; on le redit, c'est discutable.

Poussant plus loin encore, on note qu'une telle motivation a un effet pervers ; cette motivation peut laisser penser aux petits professionnels de la finance, peu connus, qu'ils auront - systématiquement ? - l'indulgence de la CSAMF. L'effet pervers est bien dans la tentation aiguisée.

Voilà donc une affaire à suivre, avec ce cas ou d'autres.




Décision AMF, 25-07-2017, à l'égard de Natixis Asset Management SA, sanction
N° LXB : L3044LGT

Source Editions LEXBASE



Décision de sanction du 25 juillet 2017 à l'égard de Natixis Asset Management SA



La Commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers (ci-après « AMF »), réunie en formation plénière ;

Vu l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code monétaire et financier et notamment ses articles R. 214-28, R. 214-32-39, L. 214-9, L. 214-24-44, L. 533-1, L. 533-12, L. 621-14, L. 621-15, R. 621-7 et R. 621-38 à R. 621-40 ;

Vu le règlement général de l'AMF et notamment ses articles 143-5, 314-3, 314-3-1, 319-3, 411-113, 411-114, 422-71 et 422-72 ;

Vu l'article 17.2 du règlement délégué (UE) n° 231/2013 de la Commission européenne du 19 décembre 2012 ;

Vu les instructions AMF 2011-19 et 2011-20 ;

Après avoir entendu au cours de la séance publique du 23 juin 2017 :

- M. Bruno Gizard en son rapport ;

- M. Pierre-Eliott Rozan, représentant la Directrice générale du Trésor, qui a indiqué ne pas avoir d'observations à formuler ;

- M. Thierry Philipponnat et Mme Anne Maréchal, représentants le Collège de l'AMF ;

- la société Natixis Asset Management, représentée par M. Matthieu Duncan et assistée par Mes Antoine Juaristi, Géraldine Marteau et Martin Le Touzé, avocats au sein du cabinet Herbert Smith Freehills Paris LLP.

La personne mise en cause ayant eu la parole en dernier.

FAITS

La société Natixis Asset Management (ci-après « NAM ») a été agréée le 22 mai 1990 en tant que société de gestion de portefeuille (ci-après « SGP ») soumise au régime de la directive 85/611/CEE du 20 décembre 1985.

Depuis le 4 avril 2014, NAM est agréée par l'AMF en tant que SGP soumise au régime de la directive 2011/61/UE du 8 juin 2011.

Le capital de NAM est détenu en totalité par Natixis Global Asset Management (ci-après « NGAM »), elle-même filiale à 100 % de Natixis SA dont le capital est détenu à 71,46 % par Banques Populaires-Caisses d'Epargne.

Au 31 décembre 2014, NAM employait 640 personnes, dont 126 gérants financiers. NAM conçoit et gère notamment des fonds à formules (ci-après les « Fonds »), constitués sous forme d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières (ci-après « OPCVM ») ou de fonds d'investissements alternatifs (ci-après « FIA »), définis aux articles R. 214-28 I et R. 214-32-39 I du code monétaire et financier.

Les 133 Fonds qui ont fait l'objet du contrôle garantissent au porteur de récupérer, à l'échéance, l'intégralité du capital initialement investi (hors commissions de souscription) ainsi que la performance finale du Fonds telle que définie par une formule.

Ils sont constitués de deux parties : d'une part, un panier d'actifs figurant au bilan du Fonds qui va permettre de garantir ou protéger à l'échéance le capital investi, d'autre part, hors bilan, un swap de performance, conclu entre le Fonds et une contrepartie bancaire, qui permet de délivrer au Fonds la formule promise aux porteurs à l'échéance. En échange, le Fonds verse périodiquement à la contrepartie bancaire un flux variable.

Pour chacun des Fonds, NAM a conclu une convention de garantie par laquelle le garant s'engage à combler l'éventuel écart entre la valeur liquidative du Fonds à l'échéance et la valeur liquidative garantie, sous réserve des évolutions fiscales et réglementaires susceptibles d'affecter la performance des Fonds. Le coût de cette garantie est intégré aux frais de gestion et donc supporté par les porteurs.

Outre la garantie contractuelle, NAM a constitué une marge de sécurité exigée par le garant des Fonds, un « coussin » dont l'objet était, selon elle, de couvrir le risque de marché et le risque de taille pendant la phase de lancement, puis, pendant la vie des Fonds, de couvrir les risques règlementaires, opérationnels ou fiscaux.

La principale composante du coussin est la marge de structuration. S'y ajoutent les commissions de rachat acquises au Fonds nettes du coût de réajustement des swaps.

La marge de structuration est la différence entre les flux reçus par le Fonds provenant du swap de performance et les flux versés par le Fonds à la contrepartie bancaire et aux différents intervenants. Elle alimente l'actif net du Fonds (compte de classe 1) durant la vie de celui-ci.

A l'échéance, le reliquat de la marge de structuration, correspondant à la différence entre la valeur liquidative à l'échéance et la valeur liquidative garantie (ci-après la « Différence issue de la marge de structuration »), est débité de l'actif net et crédité dans un compte de dette du Fonds (compte de classe 4, dettes vis-à-vis de la SGP).

Au cours de la vie du Fonds, les porteurs ont la possibilité de sortir du Fonds.

Les commissions dues par les porteurs en cas de rachat au cours de la vie du Fonds sont de 4 % de la valeur liquidative des parts remboursées. Elles sont pour moitié acquises au Fonds et pour moitié réparties entre la SGP et le réseau de distribution du Fonds. Elles servent, aux termes des prospectus, « à compenser les frais supportés par [le Fonds] pour désinvestir les avoirs confiés ».

Le montant des commissions de rachat acquises au Fonds qui reste après déduction des coûts liés au désinvestissement, constitue les Commissions de rachat nettes des coûts d'ajustement (ci-après « Commissions de rachat nettes »).

Elles sont, pour un instant de raison, inscrites à l'actif net du Fonds, puis en sont débitées pour être créditées sur un compte de dette du Fonds.

A l'échéance, s'il existe un écart entre la valeur liquidative et la valeur liquidative garantie que la marge de structuration n'a pas suffi à combler, les Commissions de rachat nettes sont basculées à l'actif net du Fonds afin de combler cet écart, sans avoir à faire appel au garant.

Ce cas s'est produit 7 fois sur 39 Fonds arrivés à échéance entre début 2012 et le 1er juin 2015.

Dans le cas contraire, les sommes en cause restent inscrites en compte de dette.

A la suite d'un signalement du directeur de la conformité, du contrôle interne et des risques de NAM du 14 septembre 2014 relatif à des « marges cachées » dans les Fonds qu'elle a structurés et qu'elle gère, NAM a demandé à NGAM de diligenter un audit interne sur les pratiques de la SGP en matière de rémunération des Fonds, dont les résultats ont donné lieu à un rapport de la direction Compliance, Risk Management et Audit Interne de NGAM daté du 15 décembre 2014.

NAM a informé l'AMF du lancement de l'audit et lui a transmis le rapport précité le 16 décembre 2014. Les éléments factuels ci-dessus rappelés sont issus de ce rapport.

PROCÉDURE

Le 3 février 2015, le secrétaire général de l'AMF a décidé de procéder à un contrôle portant « sur le respect par la société NATIXIS ASSET MANAGEMENT (N° Agrément : GP90009) de ses obligations professionnelles ».

Le contrôle a porté sur 133 Fonds structurés et gérés par NAM et donné lieu à l'établissement d'un rapport du 16 novembre 2015, qui a été adressé à cette dernière par lettre du 25 novembre suivant, l'informant qu'elle disposait d'un délai d'un mois pour présenter des observations.

Par lettre du 22 janvier 2015, NAM a déposé des observations.

L'AMF a versé à la procédure des documents intitulés « fiches de constats complémentaires » mentionnés comme ayant été établis à la suite des observations formulées par NAM en réponse au rapport de contrôle.

Le Collège de l'AMF réuni en formation plénière a décidé, le 31 mai 2016, de notifier des griefs à NAM.

La notification de griefs a été adressée à NAM par lettre du 19 juillet 2016.

Il est reproché à NAM, en ce qui concerne le « prélèvement des commissions de rachat acquises aux Fonds » :

- d'avoir délivré une information dans le prospectus des Fonds qui était, d'une part, « parcellaire » car indiquant que les commissions de rachat acquises aux Fonds servaient « à compenser les frais supportés par [le Fonds] pour désinvestir les avoirs confiés », alors que les coûts d'ajustement étaient bien inférieurs à ces commissions, et, d'autre part, trompeuse car indiquant que les commissions de rachat étaient « acquises » aux Fonds alors qu'une fois déduits les coûts d'ajustement, celles-ci étaient systématiquement basculées en compte de dette des Fonds et, partant, ne bénéficiaient pas aux Fonds ; et

- d'avoir, au détriment de l'intérêt des porteurs de parts et en méconnaissance des termes des prospectus des Fonds qui prévoyaient que les commissions de rachat acquises au Fonds demeuraient acquises à celui-ci, prélevé les Commissions de rachat nettes sur l'actif net des Fonds en leur faisant ainsi supporter une charge indue et injustifiée pour un montant total estimé à 15,6 millions d'euros ;

en méconnaissance des dispositions des articles L. 214-9, L. 214-24-44, L. 533-1 et L. 533-12 I du code monétaire et financier, de l'article 17.2 du règlement délégué (UE) n° 231/2013 de la Commission européenne du 19 décembre 2012, des articles 314-3, 314-3-1 5°, 319-3 1°, 2° et 7°, 411-113 et 422-71 du règlement général de l'AMF ainsi que des instructions AMF 2011-19 et 2011-20 ;

- une fois les Commissions de rachat nettes réintégrées parmi les frais de gestion supportés par les Fonds au titre de l'exercice au cours duquel elles avaient été prélevées sur l'actif net, celles-ci constituant une rémunération pour NAM, d'avoir, pour 18 Fonds, au titre des exercices clos en 2012, 2013, 2014 et/ou 2015, dépassé le taux maximum de frais de gestion indiqué dans les prospectus à concurrence d'un montant total estimé à 3,6 millions d'euros, en méconnaissance des dispositions des articles L. 214-9, L. 214-24-44 et L. 533-1 du code monétaire et financier, de l'article 17.2 du règlement délégué (UE) n° 231/2013 de la Commission européenne du 19 décembre 2012 ainsi que des articles 314-3, 314-3-1 5°, 319-3 1°, 2° et 7°, 411-113, 411-114, 422-71 et 422-74 du règlement général de l'AMF ;

- d'avoir délivré une information inexacte et trompeuse en s'abstenant, dans les rapports annuels des Fonds publiés en 2012, 2013 et 2014, de mentionner, au titre des frais de gestion, les Commissions de rachat nettes prélevées sur l'actif net, d'un montant total estimé à 14,9 millions d'euros, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 533-12 I du code monétaire et financier.

Il est encore fait grief à NAM, en ce qui concerne le « prélèvement à l'échéance de la différence issue de la marge de restructuration » :

- une fois réintégrée parmi les frais de gestion la Différence issue de la marge de structuration prélevée à l'échéance sur l'actif net des Fonds, celle-ci constituant une rémunération pour NAM, d'avoir, au détriment de l'intérêt des porteurs, pour 9 Fonds dissous et 9 Fonds transformés entre 2012 et 2015, dépassé le taux maximum de frais de gestion mentionné dans les prospectus à concurrence d'un montant total estimé à 12,5 millions d'euros, en méconnaissance des dispositions des articles L. 214-9, L. 214-24-44 et L. 533-1 du code monétaire et financier, de l'article 17.2 du règlement délégué (UE) n° 231/2013 de la Commission européenne du 19 décembre 2012 ainsi que des articles 314-3, 314-3-1 5°, 319-3 1°, 2° et 7°, 411-113, 411-114, 422-71 et 422-72 du règlement général de l'AMF ;

- d'avoir délivré une information inexacte et trompeuse en s'abstenant, dans les rapports annuels des Fonds transformés publiés en 2012, 2013, 2014 et/ou 2015, de mentionner, au titre des frais de gestion, le montant tiré de la Différence issue de la marge de structuration prélevée par NAM à l'échéance sur l'actif net du Fonds, d'un montant total estimé à un million d'euros, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 533-12 I du code monétaire et financier.

Une copie de la notification de griefs a été transmise le 19 juillet 2016 à la présidente de la Commission des sanctions, conformément aux dispositions de l'article R. 621-38 du code monétaire et financier.

Par décision du 5 septembre 2016, la présidente de la Commission des sanctions a désigné M. Bruno Gizard en qualité de rapporteur.

Par lettre du 5 septembre 2016, NAM a été informée qu'elle disposait d'un délai d'un mois, en application de l'article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, pour demander la récusation du rapporteur dans les conditions prévues par les articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du code monétaire et financier.

Le 14 novembre 2016, NAM a déposé des observations en réponse à la notification de griefs.

Le 5 avril 2017, NAM a été entendue par le rapporteur.

Le 17 mai 2017, le rapporteur a déposé son rapport.

Par lettre du 17 mai 2017 à laquelle était joint le rapport du rapporteur, NAM a été convoquée à la séance de la Commission des sanctions du 23 juin 2017 et informée qu'elle disposait d'un délai de quinze jours pour présenter des observations en réponse à ce rapport, conformément au III de l'article R. 621-39 du code monétaire et financier.

Par lettre du 29 mai 2017, NAM a été informée de la composition de la formation de la Commission des sanctions appelée à délibérer lors de la séance du 23 juin 2017 ainsi que du délai de quinze jours dont elle disposait, en application de l'article R. 621-39-2 du code monétaire et financier, pour demander, conformément aux articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code, la récusation d'un ou de plusieurs de ses membres.

NAM et le Collège de l'AMF ont déposé des observations en réponse au rapport du rapporteur, respectivement les 1er et 7 juin 2017.

Le 19 juin 2017, NAM a déposé des observations et pièces complémentaires.

MOTIFS DE LA DECISION

I. Sur l'exception de nullité de la procédure

Dans ses observations en réponse à la notification de griefs, NAM soulève la nullité de la procédure de contrôle et de la notification de griefs subséquente pour déloyauté dans l'administration de la preuve, violation du secret professionnel et partialité d'un contrôleur ayant porté une atteinte au caractère équitable et contradictoire de la procédure et compromis irrémédiablement les droits de la défense.

1. Sur la déloyauté dans l'administration de la preuve

Des « fiches de constats complémentaires » ont été versées au dossier de la procédure par les services de l'AMF postérieurement aux observations de NAM en réponse au rapport de contrôle.

NAM soutient d'une part que ces fiches ont constitué l'un des fondements de la décision du Collège de notifier des griefs et de saisir la Commission des sanctions alors qu'elles ont été produites en dehors de tout cadre légal et, d'autre part, qu'elle n'a pas pu faire valoir ses observations sur ces fiches avant la décision du Collège, en violation de l'article 6, paragraphes 1 et 3, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (ci-après la « CESDH »).

L'article L. 621-15 I du code monétaire et financier, dans sa rédaction en vigueur le 31 mai 2016, date de la décision du Collège de notifier des griefs, non modifiée depuis dans un sens moins sévère, dispose : « Le collège examine le rapport d'enquête ou de contrôle établi par les services de l'Autorité des marchés financiers, ou la demande formulée par le président de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. S'il décide l'ouverture d'une procédure de sanction, il notifie les griefs aux personnes concernées [...] ».

L'article 143-5 du règlement général de l'AMF, non modifié depuis l'arrêté du 12 octobre 2004, précise : « Tout rapport établi au terme d'un contrôle est communiqué à l'entité ou la personne morale contrôlée. [...]. L'entité ou la personne morale à laquelle le rapport a été transmis est invitée à faire part au secrétaire général de l'AMF de ses observations dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours. Les observations sont transmises au collège lorsque celui-ci examine le rapport en application du I de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier ».

D'une part, en l'espèce, les fiches litigieuses se bornent à présenter une analyse complémentaire des éléments mentionnés dans le rapport de contrôle en intégrant les observations en réponse de NAM.

Par ailleurs, les griefs notifiés sont en conformité avec les éléments factuels recueillis par les contrôleurs et consignés dans le rapport de contrôle.

C'est donc à tort que NAM soutient que la prise en compte par le Collège des fiches litigieuses est irrégulière au regard des textes régissant la procédure applicable jusqu'à la notification de griefs.

D'autre part, NAM a pu, à compter de la notification de griefs, consulter l'entier dossier de la procédure, dont ces fiches, et faire valoir ses arguments en défense. Elle a notamment déposé des observations écrites les 14 novembre 2016, 1er et le 19 juin 2017 et a été entendue par le rapporteur ainsi que lors de la séance de la Commission des sanctions.

Il s'ensuit qu'aucune déloyauté portant une atteinte irrémédiable aux droits de la défense, ni aucune violation des dispositions invoquées de l'article 6 de la CESDH ne sont établies.

2. Sur la violation du secret professionnel entraînant une violation des droits de la défense

Pour soutenir que des collaborateurs de l'AMF en charge de la contrôler ont violé le secret professionnel et les droits de la défense et que la procédure de contrôle a ainsi été entachée d'une irrégularité grave et irrémédiable, NAM produit un article publié dans l'édition du 17 août 2015 du quotidien Les Echos, relatif au contrôle dont elle faisait l'objet, qui évoque une note interne de l'AMF du 10 juin 2015, ainsi que deux articles publiés sur le site d'information Mediapart les 11 avril et 20 juillet 2016 comportant des références à une note interne de l'AMF du 9 avril 2015, le premier de ces articles contenant même un lien y renvoyant.

Cependant, pour inadmissible que soit la communication des notes internes à la presse qui les a publiées, leur contenu est sans effet sur l'appréciation des manquements allégués et les droits de la défense.

NAM fait encore valoir que, parmi les destinataires de la note interne du 9 avril 2015, émise par la Direction des contrôles de l'AMF, figurent des collaborateurs de la Direction de la gestion d'actifs qui n'avaient pas à connaître des informations qui y étaient contenues, et qu'un tel procédé est déloyal.

Toutefois, NAM ne précise pas en quoi cette transmission d'informations constitue une déloyauté dans la conduite du contrôle ayant porté une atteinte irrémédiable aux droits de la défense.

Il s'ensuit qu'aucune violation des droits de la défense en raison d'une violation du secret professionnel n'est établie.

3. Sur la partialité de l'un des contrôleurs

NAM expose qu'un collaborateur de l'AMF a rencontré, le 21 novembre 2014, l'ancien directeur conformité, contrôle interne et risques de NAM qui avait signalé des « marges cachées » constituées dans les Fonds, que ce collaborateur a ensuite été désigné en qualité de contrôleur associé dans le cadre de la procédure de contrôle ouverte le 3 février 2015 et qu'il était le supérieur hiérarchique du chef de la mission de contrôle.

Elle en déduit que le collaborateur concerné n'était pas impartial et a pu orienter le contrôle. Elle prétend qu'il en résulte, d'une part, une atteinte au caractère équitable et contradictoire de la procédure de sanction, dès lors qu'elle n'a pu répliquer utilement aux propos tenus par son ancien directeur de la conformité, à défaut de procèsverbal de l'entretien du 21 novembre 2014, et, d'autre part, un déséquilibre entre les droits des parties dès lors qu'il n'a pas été procédé à l'audition de cet ancien directeur après l'ouverture du contrôle.

Cependant, si l'article R. 621-35 du code monétaire et financier prévoit que les procès-verbaux établis dans le cadre des contrôles comportent certaines énonciations et signatures et impose aux contrôleurs qui recueillent des explications sur place de dresser un procès-verbal distinct du procès-verbal de visite, il ne s'applique que pendant le contrôle, ouvert le jour de la signature des ordres de mission par le secrétaire général de l'AMF.

Or, en l'espèce, ce dernier a décidé d'ouvrir le contrôle de NAM le 3 février 2015, soit à une date postérieure à l'entretien litigieux, qui a eu lieu le 21 novembre 2014.

Ensuite, la mission de contrôle, qui était libre de déterminer la nature et l'étendue des investigations auxquelles elle procédait, n'était pas tenue d'entendre l'ancien directeur de la conformité de NAM.

D'ailleurs, il n'est pas démontré en quoi l'absence de procès-verbal de l'entretien litigieux hors du cadre de toute procédure et le défaut d'audition de l'ancien directeur de la conformité de NAM après l'ouverture du contrôle caractérisent une atteinte au caractère équitable et contradictoire de la procédure de sanction ou un déséquilibre entre les droits des parties.

Enfin, NAM ne fait état d'aucun élément concret concernant les investigations menées par ce contrôleur ou son comportement au cours du contrôle qui permettrait de remettre en cause son impartialité.

Il s'en déduit que ni la partialité du contrôleur en cause, ni une atteinte au caractère équitable et contradictoire de la procédure de sanctions ni un déséquilibre entre les droits des parties ne sont établis.

En définitive, aucun des trois éléments invoqués au soutien de l'exception de nullité n'étant retenu, cette exception sera rejetée.

II. Sur les griefs relatifs au prélèvement des commissions de rachat acquises aux Fonds

La notification articule trois griefs relatifs au prélèvement par NAM des Commissions de rachat nettes, les deux premiers relatifs à la qualité de l'information donnée dans les prospectus des Fonds et le troisième aux charges indues et injustifiées supportées par les porteurs de parts, qu'elle fonde, sans distinguer selon les griefs concernés, sur les articles L. 214-24-44, L. 214-9, L. 533-1, L. 533-12 I du code monétaire et financier, l'article 17.2 du règlement délégué (UE) n° 231/2013 de la Commission européenne du 19 décembre 2012, les articles 314-3, 314-3-1 5°, 319-3 1°, 2° et 7°, 411-113 et 422-71 du règlement général de l'AMF ainsi que sur les instructions AMF 2011-19 et 2011-20.

1. Sur les griefs tenant à l'information délivrée

Il est reproché à NAM d'avoir, dans les prospectus des Fonds, délivré une information « parcellaire » en indiquant que les commissions de rachat acquises au Fonds d'un montant de 2 % de la valeur liquidative de la part remboursée servaient à compenser les frais supportés par le Fonds pour désinvestir les avoirs confiés, alors que les coûts liés aux rachats des parts étaient bien inférieurs à ces commissions, et, en outre, une information trompeuse en mentionnant que les commissions de rachat étaient « acquises » au Fonds alors qu'elles étaient systématiquement basculées en compte de dette des Fonds et, partant, ne bénéficiaient pas à ces derniers.

L'article L. 533-12 I du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur depuis le 1er novembre 2007, énonce : « I. - Toutes les informations, y compris les communications à caractère promotionnel, adressées par un prestataire de services d'investissement à des clients, notamment des clients potentiels, présentent un contenu exact, clair et non trompeur. Les communications à caractère promotionnel sont clairement identifiables en tant que telles ».

L'article 411-113 du règlement général de l'AMF, applicable aux OPCVM, et l'article 422-71 du même règlement, applicable aux FIA, dans leurs versions en vigueur, respectivement, du 21 octobre 2011 au 16 avril 2016 et depuis le 21 décembre 2013, non modifiées depuis dans un sens moins sévère, disposent : « Le prospectus de l'OPCVM [ou du FIA] contient les renseignements nécessaires pour que les investisseurs puissent juger en pleine connaissance de cause l'investissement qui leur est proposé, et notamment les risques inhérents à celui-ci. [...] / Les éléments essentiels du prospectus sont tenus à jour. Le contenu du prospectus est défini dans une instruction de l'AMF ».

Les instructions AMF 2011-19 et 2011-20 du 21 décembre 2011, modifiées le 26 octobre 2012, relatives notamment à l'établissement des prospectus des OPCVM et des FIA précisent que « L'objectif du prospectus est de donner une description de l'exhaustivité des frais, commissions et rémunérations des différents acteurs et intermédiaires, les informations complémentaires (commissions de gestion indirectes par exemple) venant détailler le total des frais courant du document d'information clé pour l'investisseur ».

En l'espèce, les divers prospectus des Fonds versés à la procédure affirment que le porteur qui cède des parts avant l'échéance supporte des commissions de rachat correspondant à 4 % de la valeur liquidative des parts remboursées qui sont, pour moitié, « non acquises » au Fonds et réparties entre la société de gestion et le réseau de distribution et, pour moitié, « acquises » au Fonds.

Il y est précisé que « les commissions acquises [aux Fonds] servent à compenser les frais supportés par [les Fonds] pour investir ou désinvestir les avoirs confiés ».

- Sur le caractère « parcellaire » de l'information relative à l'utilisation des commissions de rachat acquises aux Fonds

Il résulte des éléments recueillis par les contrôleurs que les coûts de réajustement du swap sont essentiellement dus à l'écart entre le prix demandé (« bid ») et le prix milieu de fourchette (« mid ») qui est fixé à 0,5 % dans les contrats de swap, tandis que la commission de rachat acquise aux Fonds s'élève à 2 %.

NAM reconnaît que les coûts de réajustement sont en moyenne inférieurs au montant des commissions de rachat acquises aux Fonds. Ces commissions ne servent donc qu'en partie à compenser les frais supportés pour désinvestir les avoirs confiés.

L'information contenue dans les prospectus des Fonds, « parcellaire », est donc inexacte.

- Sur le caractère trompeur de l'information indiquant que les commissions de rachat sont, pour moitié, « acquises » aux Fonds

Selon l'article 122-4 du plan comptable des OPCVM, les commissions de souscription ou de rachat acquises à l'OPC à capital variable sont incluses dans le montant du capital.

Il résulte des pièces produites à la procédure que les commissions de rachat acquises aux Fonds sont bien inscrites à l'actif net des Fonds. Mais elles n'y restent que pour un instant de raison puis sont immédiatement débitées pour être créditées sur un compte de dette des Fonds.

Les coûts d'ajustement du swap, qui interviennent avec un décalage temporel, sont ensuite débités de ce compte de dette et crédités à l'actif net du Fonds. Les Commissions de rachat nettes sont maintenues dans le compte de dette du Fonds.

NAM affirme que les Commissions de rachat nettes sont ainsi « provisionnées » afin d'alimenter le coussin et pouvoir éventuellement, à l'échéance, être créditées à l'actif net du Fonds pour combler la différence entre la valeur liquidative et la valeur liquidative garantie.

Elle ajoute que ses prospectus sont la reprise de la formulation figurant dans l'instruction AMF 2005-02, comme le font les autres SGP dans leurs prospectus.

Cependant, il convient d'observer que le Fonds ne peut bénéficier de ces Commissions de rachat nettes qu'à la triple condition que la valeur liquidative à l'échéance soit inférieure à la valeur liquidative garantie, que la garantie contractuelle ne soit pas appelée pour combler l'écart et que la marge de structuration du coussin, inscrite à l'actif net du Fonds, ne soit pas suffisante.

L'information contenue dans les prospectus des Fonds selon laquelle les Commissions de rachat sont « acquises » au Fonds est donc trompeuse.

Dès lors que l'information donnée dans les prospectus n'est pas conforme à la pratique mise en place par NAM, l'argumentation de NAM relative à l'instruction de l'AMF et aux prospectus des autres SGP est inopérante.

Il résulte de ce qui précède que l'information adressée par NAM aux porteurs dans les prospectus des Fonds ne présentait pas un contenu exact, clair et non trompeur, en violation de l'article L. 533-12 I du code monétaire et financier, et que ces prospectus ne contenaient pas les renseignements nécessaires pour que les investisseurs puissent juger en pleine connaissance de cause l'investissement qui leur était proposé, en violation des articles 411-113 et 422-71 du règlement général de l'AMF.

2. Sur le grief relatif aux charges indues et injustifiées pour les porteurs

Il est reproché à NAM d'avoir prélevé sur l'actif net des Fonds des sommes issues des Commissions de rachat nettes, alors qu'elles étaient pourtant acquises à ces derniers, leur faisant ainsi supporter, au détriment des porteurs, une charge indue et injustifiée dont le montant total est estimé à 15,6 millions d'euros.

Pour contester avoir indûment prélevé le montant correspondant aux Commissions de rachat nettes en le débitant de l'actif net pour le créditer en compte de dette, NAM prétend que cette écriture comptable ne correspond pas à une rémunération mais à une provision pour risque alimentant le coussin destiné à protéger les porteurs.

Elle affirme qu'une telle comptabilisation a été mise en place dans le seul intérêt des porteurs afin de maximiser les possibilités d'atteindre la formule.

Elle fait valoir que les Commissions de rachat nettes n'ont pas pour vocation d'augmenter l'actif net des Fonds puisque les Fonds garantissent à l'échéance le bénéfice d'un montant déterminé, mais de neutraliser les frais induits par les mouvements de sortie et dissuader toute nouvelle souscription ou sortie du Fonds anticipée. Selon elle, aucun texte n'interdit de les faire entrer dans l'assiette du calcul des frais de gestion.

Elle ajoute que si les Commissions de rachat nettes avaient été maintenues dans l'actif net, elles auraient artificiellement augmenté la valeur liquidative et, ainsi, pu inciter les porteurs à sortir de façon anticipée du Fonds en leur faisant perdre le bénéfice de la garantie due à l'échéance, tandis que les porteurs restants auraient, eux, obtenu un bénéfice indu puisque supérieur au montant fixé par le prospectus.

L'article L. 533-1 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur depuis le 1er novembre 2007, dispose que : « les prestataires de services d'investissement agissent d'une manière honnête, loyale et professionnelle, qui favorise l'intégrité du marché ».

L'article L. 214-9 du code monétaire et financier, qui concerne les OPCVM, et l'article L. 214-24-44 du même code, qui concerne les FIA, dans leurs versions en vigueur, respectivement, depuis le 3 août 2011 et le 28 juillet 2013, non modifiées depuis dans un sens moins sévère, ajoutent que la société de gestion doit agir « de façon indépendante et dans le seul intérêt des porteurs de parts ou actionnaires ».

L'article 314-3 du règlement général de l'AMF, dans sa version en vigueur depuis le 21 octobre 2011, précise que : « Le prestataire de services d'investissement agit d'une manière honnête, loyale et professionnelle, avec la compétence, le soin et la diligence qui s'imposent, afin de servir au mieux l'intérêt des clients [...] ».

L'article 319-3 du même règlement, dans sa version en vigueur depuis le 14 août 2013, ajoute : « La société de gestion de portefeuille : 1° Agit honnêtement et loyalement, avec la compétence, le soin et la diligence requis dans l'exercice de ses activités ; 2° Agit au mieux des intérêts des FIA ou des porteurs de parts ou actionnaires des FIA qu'elle gère, et de l'intégrité du marché [...] ; 7° Se conforme aux articles 17 à 23 du règlement délégué (UE) n° 231/2013 de la Commission européenne du 19 décembre 2012 [...] ».

L'article 17.2 du règlement délégué (UE) n° 231/2013 de la Commission européenne du 19 décembre 2012, applicable aux sociétés de gestion de portefeuille de FIA, dispose que : « Les gestionnaires font en sorte que les FIA qu'ils gèrent ou les investisseurs de ces FIA n'aient pas à payer des coûts injustifiés ».

L'article 314-3-1 5° du règlement général de l'AMF, dans sa version en vigueur depuis le 21 octobre 2011, non modifiée depuis dans un sens moins sévère, précise que : « Pour l'activité de gestion d'OPCVM, le prestataire de services d'investissement : [...] 5° Agit de manière à prévenir l'imposition de coûts indus aux OPCVM et à leurs porteurs de parts ou actionnaires ».

Les pièces de la procédure permettent de dégager les éléments suivants :

D'abord, si elles étaient bien portées un instant de raison à l'actif des Fonds conformément à l'article 122-4 du plan comptable des OPCVM, les Commissions de rachat nettes étaient aussitôt débitées de l'actif net pour être créditées sur un compte de dette du Fonds.

Selon l'article 212-1 du plan comptable général, cet enregistrement suppose l'existence d'un bénéficiaire tiers distinct de l'entité elle-même. En effet, ces dettes supposent un créancier.

Ensuite, NAM a déclaré que le coussin, en partie composé de ces Commissions de rachat nettes, « [faisait] partie des revenus de NAM et [était] laissé dans le fonds jusqu'à l'échéance [...] pour faire face aux aléas réglementaires et fiscaux. Si ces risques ne se matérialis[aient] pas, NAM repren[ait] ce coussin qui [était] son dû », ce qui démontre qu'elle se considérait comme la créancière des sommes résultant des Commissions de rachat nettes.

Le rapport de contrôle interne adressé à l'AMF le 16 décembre 2014 et les procès-verbaux d'auditions diligentées par les contrôleurs confirment cette déclaration.

Enfin, les porteurs de parts étaient déjà protégés par la garantie souscrite par NAM pour chacun des Fonds, qui couvrait le risque de non-atteinte à l'échéance de la valeur liquidative garantie, sous réserve des évolutions fiscales ou réglementaires, ce qui leur était rappelé dans les prospectus. Il en était de même de la marge de structuration qui alimentait l'actif net du Fonds.

Par ailleurs, si NAM fait valoir qu'elle servait les intérêts des porteurs de parts en les prémunissant contre les aléas exclus de la garantie, liés aux évolutions fiscales ou réglementaires, il ressort des déclarations d'un ancien directeur général délégué de NAM selon lesquelles « commercialement, [ils étaient] contraints d'assumer ce risque pour maintenir [leur] activité », que cette pratique répondait en réalité à une volonté de préserver l'image de la SGP vis-à-vis de ses clients.

De surcroît, NAM n'a utilisé le coussin pour faire face à un risque non couvert par le garant que dans un seul cas, pour compenser les coûts dus à la taxe sur les transactions financières.

Ainsi, loin de s'analyser, comme le soutient NAM, en une provision pour risques constituée dans l'intérêt des porteurs, au demeurant non prévue par le plan comptable des OPCVM, le montant des Commissions de rachat nettes figurant en compte de dette du Fonds correspondait à des sommes dont NAM s'estimait créancière, dont elle décidait l'affectation en considération de ses intérêts commerciaux et qu'elle s'attribuait lorsque la valeur liquidative garantie était atteinte.

Par ailleurs, l'affirmation du caractère incitatif à la sortie anticipée des porteurs par le maintien des Commissions de rachat nettes à l'actif des Fonds n'est pas de nature à justifier une opération comptable transformant, contrairement aux affirmations des prospectus et sans information des porteurs, des Commissions acquises aux Fonds en dettes des Fonds envers la SGP. Au demeurant, la portée de cette affirmation est affaiblie par le fait que l'autre composante du coussin, la marge de structuration, était, quant à elle, inscrite à l'actif net du Fonds.

Il s'en déduit que NAM, unique bénéficiaire des Commissions de rachat nettes, s'estimait créancière des sommes correspondant aux Commissions de rachat nettes et se comportait comme telle en se les affectant sous forme de complément de frais de gestion.

Il est observé que si les Commissions de rachat nettes acquises aux Fonds avaient été maintenues à l'actif des Fonds, elles auraient à l'échéance augmenté la valeur liquidative.

La règlementation ne précise certes pas que le montant déterminé par la formule doive, le cas échéant, être augmenté de ces Commissions.

Toutefois, une telle solution résulte des prospectus qui, d'une part, garantissaient au porteur de récupérer à l'échéance un montant déterminé par application mécanique d'une formule de calcul prédéfinie sans préciser qu'il s'agissait d'un maximum et, d'autre part, ne prévoyaient pas que le reliquat des Commissions en cause serait affecté à la SGP et considéré comme des frais de gestion complémentaires ou affecté par elle à de nouveaux fonds.

Il résulte de ce qui précède qu'en créditant les Commissions de rachat nettes sur un compte de dette de ces Fonds, écriture conduisant à une diminution de la valeur liquidative du Fonds, en vue, le cas échéant, de couvrir des aléas non garantis pour protéger ses intérêts commerciaux, puis en affectant les sommes en cause soit à la couverture de ces aléas, soit, lorsque la valeur liquidative garantie était atteinte, à son bénéfice, NAM s'est affranchie des règles comptables et de la réglementation des OPCVM et FIA au motif qu'elles ne seraient pas adaptées aux fonds à formule, et ce contrairement au seul intérêt des porteurs qui ont supporté des charges indues.

Elle a ainsi violé son obligation d'agir dans le seul intérêt des porteurs de parts et fait supporter à ces derniers des charges indues et injustifiées, en méconnaissance des articles L. 533-1, L. 214-9 et L. 214-24-44 du code monétaire et financier, 314-3, 319-3 et 314-3-1 5° du règlement général de l'AMF et 17.2 du règlement délégué (UE) n° 231/2013 de la Commission européenne du 19 décembre 2012.

Le rapporteur a relevé dans son rapport la prescription des faits antérieurs au 3 février 2012.

L'article L. 621-15 du code monétaire et financier dispose que : « La commission des sanctions ne peut être saisie de faits remontant à plus de trois ans s'il n'a été fait pendant ce délai aucun acte tendant à leur recherche, à leur constatation ou à leur sanction. ».

Selon la poursuite, si le fait générateur du manquement reproché « est constaté à chaque prélèvement de commission de rachat acquise au Fonds » sur leur actif net, les faits antérieurs au 3 février 2012 ne sont pas pour autant atteints par la prescription « en l'absence d'élément de nature à justifier une vigilance particulière de l'AMF sur le prélèvement des commissions de rachat acquises aux Fonds ».

Le point de départ du délai de prescription doit être fixé au jour où le manquement est apparu et a pu être constaté dans des conditions permettant l'exercice par l'AMF de ses missions de contrôle, notamment en vue de l'ouverture d'une procédure de sanction.

En l'espèce, le premier acte interruptif de prescription est intervenu le 3 février 2015, date de l'ouverture du contrôle.

Cependant, l'AMF aurait pu constater les manquements en cause si elle avait effectué un contrôle à la réception du rapport d'audit interne de NGAM sur la « revue des pratiques de rémunération des fonds à formule » le 16 décembre 2014.

Les manquements en cause ne peuvent donc être regardés comme ayant été dissimulés à l'AMF après cette date.

En conséquence, les prélèvements des Commissions de rachat nettes reprochés à NAM antérieurs au 16 décembre 2011 sont couverts par la prescription.

Le calcul du montant des charges indues et injustifiées supportées par les porteurs, évalué à 15,6 millions d'euros entre 2012 et 2015, n'est pas discuté. Cette somme sera donc retenue.

3. Sur le grief relatif au dépassement des frais de gestion

Selon la notification de griefs, le prélèvement des Commissions de rachat nettes par débit de l'actif net du Fonds s'analyse en une rémunération pour NAM, de sorte que le montant correspondant aurait dû être comptabilisé dans les frais de gestion supportés par les Fonds au titre de l'exercice alors en cours.

Après réintégration des montants en cause dans les frais de gestion, NAM aurait fait supporter à 18 Fonds, au titre des exercices clos en 2012, 2013, 2014 et/ou 2015, des dépassements du taux maximum de frais de gestion prévu par les prospectus d'un montant estimé de 3,6 millions d'euros, en violation des articles L. 214-24-44, L. 214-9 et L. 533-1 du code monétaire et financier, 17.2 du règlement délégué (UE) n° 231/2013 de la Commission européenne du 19 décembre 2012 ainsi que 314-3, 314-3-1 5°, 319-3 1°, 2° et 7°, 411-113, 411- 114, 422-71 et 422-74 du règlement général de l'AMF.

NAM conteste la qualification de frais de gestion.

Elle fait valoir qu'en tout état de cause, l'écriture de provisionnement en classe 4 ne peut correspondre à une rémunération ab initio, dès l'inscription des Commissions de rachat nettes en compte de dette du Fonds, mais seulement lorsque le montant en cause aura effectivement été perçu par elle. Avant ce moment, elle n'est qu'une provision pour risques alimentant le coussin. C'est pourquoi leur montant n'est pas inscrit dans ses comptes.

A titre liminaire, il convient de relever que c'est par l'effet d'une erreur matérielle manifeste que l'article 422-74 du règlement général de l'AMF a été mentionné dans la partie « caractérisation » de la notification de griefs parmi les textes fondant le grief à la place de l'article 422-72 du même règlement.

Ne seront reproduits ci-après que les textes non déjà cités lors de l'examen du précédent grief.

L'article 411-114 du règlement général de l'AMF, qui concerne les OPCVM, et l'article 422-72 du même règlement, qui concerne les FIA, dans leurs versions en vigueur, respectivement, depuis le 21 octobre 2011 et le 21 décembre 2013, non modifiées depuis dans un sens moins sévère, disposent : « Le prospectus décrit l'ensemble des frais supportés par les porteurs ou par le fonds d'investissement à vocation générale [ou par l'OPCVM], toutes taxes comprises, en indiquant : [...] 2° Pour les frais supportés par le fonds d'investissement à vocation générale [ou par l'OPCVM], le taux de frais de fonctionnement et de gestion maximum [...] ».

Comme il a été dit, NAM décidait librement de l'affectation des Commissions de rachat nettes figurant sur le compte de dette du Fonds et les considérait elle-même comme des revenus destinés à être perçus par elle lorsqu'elle n'en décidait pas autrement.

Les sommes en cause constituaient donc bien une rémunération pour NAM, peu important que celle-ci n'ait pas été immédiatement perçue dans la mesure où l'impact est équivalent pour les porteurs.

D'ailleurs, les frais de gestion non issus du coussin, qui sont comptabilisés en compte de classe 6 du Fonds, ont une incidence sur la valeur liquidative du Fonds dès leur provisionnement, alors même qu'ils peuvent n'être perçus par la société de gestion qu'ultérieurement.

Parmi les sources de rémunération d'une société de gestion, limitativement énumérées par les articles 314-77 et 319-12 du règlement général de l'AMF, les sommes en cause ne sont susceptibles de relever que de la catégorie des frais de gestion.

Les Commissions de rachat nettes auraient donc dû être comptabilisées comme des frais de gestion supportés par les Fonds au titre des exercices au cours desquels elles ont été débitées de l'actif net des Fonds pour être inscrites en compte de dette.

La réintégration des montants correspondants en frais de gestion conduit, pour 18 Fonds, au titre des exercices clos en 2012, 2013, 2014 et/ou 2015, à un dépassement du taux maximum de frais de gestion prévu par les prospectus représentant un total de 3,6 millions d'euros.

Il s'ensuit que NAM, qui a fait supporter à 18 Fonds des coûts indus et injustifiés dont elle était le bénéficiaire, n'a pas agi dans le seul intérêt des porteurs, en méconnaissance des articles L. 214-24-44, L. 214-9 et L. 533-1 du code monétaire et financier, de l'article 17.2 du règlement délégué (UE) n°231/2013 de la Commission européenne du 19 décembre 2012 ainsi que des articles 314-3, 314-3-1 5°, 319-3 1°, 2° et 7°, 411-113, 411-114, 422-71 et 422-72 du règlement général de l'AMF.

4. Sur le grief relatif à l'information contenue dans les rapports annuels

Il est reproché à NAM d'avoir indiqué, dans les rapports annuels 2012, 2013 et 2014 des Fonds, des frais de gestion, à la fois en montant et en pourcentage de l'actif net, n'intégrant pas le montant des Commissions de rachat nettes prélevées sur l'actif net des Fonds, estimé à 14,9 millions d'euros. NAM aurait ainsi donné une information inexacte et trompeuse sur le montant et le taux de frais de gestion supportés par les Fonds au titre de l'exercice comptable clos, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 533-12 I du code monétaire et financier.

Tout en contestant la requalification des Commissions de rachat nettes en frais de gestion, NAM fait valoir qu'en tout état de cause, les porteurs pouvaient suivre le montant des commissions de rachat inscrit en compte de tiers dans les rapports annuels. Elle précise que le montant des rachats déduction faite des commissions de rachat acquises aux Fonds figurait dans le tableau d'évolution de l'actif net tandis que le montant de titres rachetés au cours de l'exercice figurait dans le tableau des titres émis ou rachetés, de sorte que par comparaison entre ces deux montants identiques, le porteur était en mesure de savoir que les Commissions de rachat nettes n'étaient pas intégrées dans l'actif net.

L'article L. 533-12 I du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur depuis le 1er novembre 2007, dispose que : « toutes les informations, y compris les communications à caractère promotionnel, adressées par un prestataire de services d'investissement à des clients, notamment des clients potentiels, présentent un contenu exact, clair et non trompeur [...] ».

Les Commissions de rachat nettes qui, comme il a été dit, constituaient des frais de gestion au titre des exercices au cours desquels elles ont été débitées de l'actif net des Fonds pour être créditées en compte de dette des Fonds, n'étaient pas comprises dans le montant et le taux de frais de gestion figurant dans les rapports annuels de chacun des Fonds publiés au titre des années 2012 à 2014.

Si les rapports annuels contenaient des informations qui, en les rapprochant, permettaient de déduire que les Commissions de rachat nettes n'étaient pas intégrées à l'actif net, cette circonstance ne suffit pas à rendre exactes, claires et non trompeuses les indications relatives au montant et au taux des frais de gestion, qui n'incluaient pas les Commissions acquises aux Fonds.

Il s'ensuit que NAM a manqué à son obligation d'adresser aux porteurs de parts des Fonds, dans les rapports annuels publiés au titre des années 2012 à 2014, une information relative au montant et au taux des frais de gestion présentant un contenu exact, clair et non trompeur, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 533-12 I du code monétaire et financier.

III. Sur les griefs relatifs au prélèvement de la Différence issue de la marge de structuration

1. Sur le grief relatif au dépassement des frais de gestion

La notification de griefs, après avoir réintégré la Différence issue de la marge de structuration, qu'elle considère comme une ressource dont NAM dispose librement, en frais de gestion supportés par le Fonds au titre du dernier exercice compris entre l'arrêté comptable précédant l'échéance et l'échéance du Fonds (ci-après la « Dernière période »), reproche à NAM d'avoir fait supporter à 9 Fonds dissous et 9 Fonds transformés entre 2012 et 2015, un taux de frais de gestion supérieur au taux maximum de frais de gestion indiqué dans le prospectus, ayant conduit à un prélèvement excédentaire de 12,5 millions d'euros, en violation des articles L. 214-24-44, L. 214-9 et L. 533-1 du code monétaire et financier, 17.2 du règlement délégué (UE) n° 231/2013 de la Commission européenne du 19 décembre 2012 ainsi que 314-3, 314-3-1 5°, 319-3 1°, 2° et 7°, 411-113, 411-114, 422-71 et 422-72 du règlement général de l'AMF.

Les textes invoqués au soutien du grief ont déjà été cités.

Il résulte des pièces de la procédure que la marge de structuration alimente l'actif net du Fonds.

A l'échéance du Fonds, lorsque la valeur liquidative est supérieure à la valeur liquidative garantie, la Différence issue de la marge de structuration est débitée de l'actif net et créditée en compte de dette du Fonds, réduisant ainsi la valeur liquidative à l'échéance à hauteur de la seule valeur liquidative garantie.

Elle est soit versée à NAM, lorsque le Fonds est dissout à l'échéance, soit conservée en compte de dette du Fonds, lorsque celui-ci est transformé à l'échéance, NAM pouvant ensuite décider de la réaffecter au Fonds transformé ou de s'en attribuer tout ou partie.

NAM affirme qu'une fois le montant prédéterminé par la formule atteint, rien ne lui interdisait de percevoir la Différence issue de la marge de structuration, dans le respect du taux maximum des frais de gestion prévu dans les prospectus sur la durée de vie des Fonds.

Elle soutient, en effet, que le taux de frais de gestion maximum se calcule non pas annuellement mais globalement sur la durée de vie du Fonds. Selon ce calcul, il n'y a pas de dépassement des frais de gestion prévus dans les prospectus.

La Différence issue de la marge de structuration, dont NAM dispose librement, ainsi que cela résulte tant des auditions au cours du contrôle que des messages électroniques échangés et du rapport de contrôle interne du 15 décembre 2014, constitue un élément de sa rémunération, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté. Elle s'analyse en frais de gestion.

Les prospectus des Fonds produits indiquent un taux maximum de frais de gestion qui varie entre 1 % et 2,5 % de la valeur liquidative sans préciser sur quelle période de référence ce taux maximum doit être apprécié.

Toutefois, les prospectus simplifiés mentionnent le taux de frais de gestion effectivement facturé au cours du dernier exercice clos, conformément d'ailleurs aux prescriptions de l'instruction AMF n° 2005-02, qui indique : « Le total facturé à l'OPCVM au cours du dernier exercice clos, exprimé en pourcentage, est égal au rapport du total facturé à l'OPCVM sur l'actif net moyen du fonds. Il est calculé annuellement, sur la base de l'exercice comptable du fonds » ; « ces frais de fonctionnement et de gestion doivent être cohérents avec le taux maximum indiqué dans la partie statutaire du prospectus simplifié ».

De même, le « Document d'Informations Clés » pour l'Investisseur de l'un des Fonds, seul à disposer d'un tel document, fait état d'un pourcentage de frais de gestion prélevés sur une année.

En outre, apprécier le taux maximum des frais de gestion sur la durée de vie du Fonds peut, en fonction du taux de frais de gestion pratiqué au cours de tel ou tel exercice, conduire à avantager ou désavantager les porteurs sortants au détriment des autres porteurs. Le principe d'égalité des porteurs de parts implique donc que ce taux maximum soit apprécié à chaque calcul de valeur liquidative et, a fortiori, à l'issue de chaque exercice.

Au demeurant, dans un e-mail interne du 18 novembre 2014 le directeur financier de NAM indiquait au directeur Finance et Opérations : « je me suis rendu compte que nous devions commencer à consommer les coussins, autrement nous perdrions des FDG [frais de gestion] (limite des FDG max sur une période qui devient de plus en plus courte [...] » ; « le rattrapage est important en 2013. Il ne s'agissait pas d'augmenter le résultat 2013, mais [...] surtout d'éviter de perdre des FDG en se réveillant trop tard et en étant limité par les frais max. ».

Ainsi, l'impossibilité de procéder à une appréciation globale du montant de frais de gestion sur la durée de vie des Fonds était connue de NAM.

Le rapport d'audit interne de NGAM du 15 décembre 2014 concluait également : « Le schéma comptable appliqué par NAM pour prélever les frais de gestion ne semble pas en ligne avec les principes comptables applicables aux fonds et les règles édictées dans leurs prospectus. Nous avons relevé sur la base de nos tests que ce mécanisme fait apparaître un dépassement du taux maximum de frais de gestion annuel prévu dans les prospectus ».

Il résulte de ce qui précède que le taux maximum de frais de gestion facturé au Fonds doit être apprécié, non pas sur la durée de vie du Fonds, mais par exercice, sans que le caractère prétendument légitime de l'objectif poursuivi par NAM - à savoir la constitution d'un coussin - puisse justifier une appréciation différente.

Une fois atteint le taux maximum de frais de gestion indiqué dans les prospectus, NAM aurait dû faire bénéficier les porteurs de la Différence issue de la marge de structuration, plutôt que de se l'approprier.

Après réintégration de la Différence issue de la marge de structuration au calcul des frais de gestion, il a été établi que, pour 9 Fonds dissous et 9 Fonds transformés, le taux des frais de gestion au cours de la Dernière période avait dépassé le taux maximum de frais de gestion mentionné dans les prospectus.

En prélevant la Différence issue de la marge de structuration sur l'actif net de 9 Fonds dissous et 9 Fonds transformés entre 2012 et 2015, NAM leur a fait supporter des frais de gestion supérieurs au taux maximum indiqué dans les prospectus, pour un montant total de 12,5 millions d'euros, manquant ainsi à son obligation d'agir au mieux de l'intérêt des porteurs ayant investi au vu des informations contenues dans le prospectus, en méconnaissance des articles L. 214-24-44, L. 214-9 et L. 533-1 du code monétaire et financier, 17.2 du règlement délégué (UE) n° 231/2013 de la Commission européenne du 19 décembre 2012 ainsi que 314-3, 314-3-1 5°, 319-3 1°, 2° et 7°, 411-113, 411-114, 422-71 et 422-72 du règlement général de l'AMF.

2. Sur le grief relatif à l'information contenue dans les rapports annuels

Il est reproché à NAM d'avoir indiqué, dans les rapports annuels de 6 Fonds transformés, publiés au titre des années 2012, 2013, 2014 et/ou 2015, des frais de gestion, à la fois en montant et en pourcentage de l'actif net, n'intégrant pas la Différence issue de la marge de structuration prélevée en Dernière période sur l'actif net du Fonds, soit un montant total de frais de gestion non mentionné estimé à un million d'euros. NAM aurait ainsi donné une information inexacte et trompeuse sur le montant et le taux de frais de gestion supportés par les Fonds au titre de l'exercice comptable clos, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 533-12 I du code monétaire et financier.

NAM soutient que le montant d'un million d'euros invoqué n'est pas susceptible d'être requalifié en frais de gestion et fait également valoir que les rapports annuels en question informaient les porteurs de l'existence d'une écriture venant diminuer l'actif net des Fonds et augmenter leur compte de dette, de sorte qu'en tout état de cause, le grief manque en fait.

L'article L. 533-12 I du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur depuis le 1er novembre 2007, dispose que : « toutes les informations, y compris les communications à caractère promotionnel, adressées par un prestataire de services d'investissement à des clients, notamment des clients potentiels, présentent un contenu exact, clair et non trompeur [...] ».

A titre liminaire, il convient de relever que c'est par l'effet d'une erreur de plume que la notification de griefs invoque les rapports annuels publiés en 2013 et 2015, alors que les éléments qui figurent dans la feuille de calcul jointe au rapport de contrôle ne se rapportent qu'à ceux publiés en 2012 et 2014 et que le montant total des fraisde gestion qui n'auraient pas été mentionnés s'élève bien dans les documents qu'elle produit à un million d'euros pour les seules années 2012 et 2014.

Comme il a été dit, la Différence issue de la marge de structuration doit, y compris pour les Fonds transformés à l'échéance, être qualifiée de frais de gestion.

Or, pour 6 de ces Fonds, les frais de gestion indiqués dans les rapports annuels publiés au titre des années 2012 ou 2014 n'intègrent pas la Différence issue de la marge de structuration prélevée en Dernière période sur l'actif net du Fonds, dont le montant total s'élève à 1 038 085 euros.

Contrairement à ce qu'affirme NAM, la comparaison des postes des rapports annuels « Autres éléments » de l'actif net des Fonds et « Autres dettes », dont les montants sont différents, ne permettait pas à un porteur de comprendre qu'un montant correspondant à la Différence issue de la marge de structuration avait été prélevé sur l'actif net des Fonds et crédité sur un compte de dette.

NAM a ainsi manqué à son obligation d'adresser aux porteurs de parts des 6 Fonds concernés, dans les rapports annuels de 2012 et 2014, une information relative aux frais de gestion présentant un contenu exact, clair et non trompeur, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 533-12 I du code monétaire et financier.

SANCTIONS ET PUBLICATION

Les griefs notifiés à NAM, tous retenus, sont relatifs aux faits commis entre 2012 et 2015.

L'article L. 621-15 II a) du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur depuis le 24 octobre 2010, non modifiée depuis dans un sens moins sévère, dispose : « II.- La commission des sanctions peut, après une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l'encontre des personnes suivantes : / Les personnes mentionnées aux 1° à 8° et 11° à 17° du II de l'article L. 621-9, au titre de tout manquement à leurs obligations professionnelles définies par les lois, règlements et règles professionnelles approuvées par l'Autorité des marchés financiers en vigueur, sous réserve des dispositions de l'article L. 612-39 ».

L'article L. 621-15 III a) du même code, dans la même version, également non modifiée dans un sens plus doux, énonce : « III.- Les sanctions applicables sont : / a) Pour les personnes mentionnées aux 1° à 8°,11°,12°,15° à 17° du II de l'article L. 621-9, l'avertissement, le blâme, l'interdiction à titre temporaire ou définitif de l'exercice de tout ou partie des services fournis, la radiation du registre mentionné à l'article L. 546-1 ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 100 millions d'euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés ; les sommes sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor public ».

Il en résulte que NAM encourt l'une des sanctions disciplinaires précitées et, en sus ou à la place, une sanction pécuniaire d'un montant maximum de 100 millions d'euros.

L'article L. 621-15 III ter du code monétaire et financier, en vigueur depuis le 11 décembre 2016, précise en ces termes les éléments à prendre en compte pour déterminer la sanction : « Dans la mise en oeuvre des sanctions mentionnées aux III et III bis, il est tenu compte notamment : - de la gravité et de la durée du manquement ; - de la qualité et du degré d'implication de la personne en cause ; - de la situation et de la capacité financières de la personne en cause, au vu notamment de son patrimoine et, s'agissant d'une personne physique de ses revenus annuels, s'agissant d'une personne morale de son chiffre d'affaires total ; - de l'importance soit des gains ou avantages obtenus, soit des pertes ou coûts évités par la personne en cause, dans la mesure où ils peuvent être déterminés ; - des pertes subies par des tiers du fait du manquement, dans la mesure où elles peuvent être déterminées ; - du degré de coopération avec l'Autorité des marchés financiers dont a fait preuve la personne en cause, sans préjudice de la nécessité de veiller à la restitution de l'avantage retiré par cette personne ; - des manquements commis précédemment par la personne en cause ; - de toute circonstance propre à la personne en cause, notamment des mesures prises par elle pour remédier aux dysfonctionnements constatés, provoqués par le manquement qui lui est imputable et le cas échéant pour réparer les préjudices causés aux tiers, ainsi que pour éviter toute réitération du manquement ».

Les manquements retenus à l'encontre de NAM, qui concernent le respect de l'intérêt exclusif des porteurs et leur bonne information résultant d'un affranchissement volontaire des règles comptables et des dispositions règlementaires applicables des OPCVM, sont d'une particulière gravité.

Ils ont été commis par l'un des acteurs importants de la gestion d'actifs en France et se sont échelonnés sur une durée de trois ans.

Ils sont de grande ampleur, comme en témoignent les montants en jeu, à savoir :

- 15,6 millions d'euros de charges indues supportées par 103 Fonds au titre des Commissions de rachat nettes débitées de leur actif net pour être créditées en compte de dette ;

- 15,8 millions d'euros (14,8 millions d'euros + 1,038 085 million d'euros) de frais de gestion non indiqués dans des rapports annuels de Fonds ;

- 16,1 millions d'euros (3,6 millions d'euros + 12,5 millions d'euros) de dépassement de frais de gestion.

Il convient aussi de tenir compte du fait que la gestion mise en oeuvre par NAM a permis, pour la totalité des Fonds, d'atteindre la formule à l'échéance et que cette dernière a pris acte de la position de la mission de contrôle en modifiant ses schémas comptables pour les fonds nouvellement lancés.

Enfin, il est relevé que NAM a dégagé un résultat net de 90 millions d'euros en 2014 et de 111 millions d'euros en 2015.

En considération de ces éléments, il sera prononcé à l'encontre de NAM un avertissement et une sanction pécuniaire de 35 000 000 d'euros.

La publication de la présente décision n'est ni susceptible de causer à NAM un préjudice grave et disproportionné, ni de nature à perturber gravement la stabilité du système financier ou encore le déroulement d'une enquête ou d'un contrôle en cours. Elle sera donc ordonnée, sans anonymisation.

PAR CES MOTIFS,

Ainsi qu'il en a été délibéré par Mme Marie-Hélène Tric, présidente, M. Jean Gaeremynck, président de la 2ème section, Mme Edwige Belliard, M. Christophe Soulard, M. Bernard Field, Mme Patricia Lazard-Kodyra, M. Christophe Lepitre, M. Lucien Millou et Mme Sophie Schiller, membres de la Commission des sanctions, en présence du secrétaire de séance, la Commission des sanctions :

- prononce à l'encontre de la société Natixis Asset Management :

* un avertissement,

* une sanction pécuniaire de 35 000 000 € (trente-cinq millions d'euros) ;

- ordonne la publication de la présente décision sur le site Internet de l'Autorité des marchés financiers et fixe à cinq ans à compter de la date de la présente décision la durée de son maintien en ligne de manière non anonyme.

Fait à Paris, le 25 juillet 2017.

Le Secrétaire de séance, Marc-Pierre Janicot

La Présidente, Marie-Hélène Tric


Cette décision peut faire l'objet d'un recours dans les conditions prévues à l'article R. 621-44 du code monétaire et financier.

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